Publié le Mercredi 2 juillet 2025 à 18h00.

Au Kenya, un renouveau des mobilisations

Un an après les grandes manifestations contre le budget, la jeunesse kenyane redescend dans la rue en dépit d’une répression accrue.

 

De nouveau, la jeunesse kenyane manifeste en souvenir des soixante personnes assassinées par la police il y un an, lors des mobilisations contre le projet de budget. À cette époque, William Ruto, le président du Kenya, pour répondre aux injonctions du FMI dans le cadre du remboursement de la dette, avait créé une multitude de taxes qui touchaient les classes populaires.

Le mouvement WanTam

Appelés par des organisations de la société civile et largement relayés par les réseaux sociaux, les « Maandamano » de ce mercredi 25 juin se sont déroulés dans les grandes villes à travers le pays. Rapidement les dizaines de milliers de manifestantEs, essentiellement des jeunes, ont scandé des slogans contre Ruto qui se prépare pour un second mandat présidentiel. Certains demandaient la démission du président, d’autres inscrivaient sur des pancartes de fortune « WanTam », expression populaire de « one term », un seul mandat.

Depuis son élection en 2022, Ruto lors de sa campagne électorale avait pu faire illusion en condamnant les violences policières, en promettant de lutter contre la pauvreté et en s’érigeant comme le candidat de la jeunesse précaire. Une fois élu, Ruto a montré son vrai visage. Il a privatisé des dizaines d’entreprises nationales, conforté son réseau clientéliste et il utilise la violence comme ses prédécesseurs.

Les forces de police ont réprimé avec violence la manifestation. Les premières estimations communiquées par Amnesty International Kenya font état de seize morts tués par balle. L’association féministe Usikimye dénonce une violence sexuelle organisée contre les femmes avec une dizaine de viols par des voyous payés par le pouvoir.

Terroriser la population

Cette violence policière est omniprésente. Elle se manifeste par des disparitions forcées qui se terminent souvent par la mort des personnes kidnappées. Cette violence a été vue par des centaines de milliers de KenyanEs sur les réseaux sociaux. On y voit, lors d’une manifestation, un policier tuer à bout portant un jeune vendeur de rue pacifique. Il y a aussi le cas d’Albert Ojwang, un jeune enseignant qui, pour avoir critiqué un haut dirigeant de la police, a été emprisonné et est mort sous la torture.

Nombre de KenyanEs se retrouvent en garde à vue lors des barrages routiers, une méthode utilisée par la police pour extorquer de l’argent contre une libération.

Cette répression est le fruit d’une volonté politique. Sous Ruto, le nombre d’enlèvements a quadruplé. Le signal de trois chaînes de télévision NTV, KTN et K24 a été coupé parce qu’elles avaient outrepassé l’interdiction de faire des reportages en direct des manifestations. Il n’a pas hésité à livrer à l’Ouganda Kizza Besigye, un des principaux opposant de Museveni qui désormais croupit en prison dans des ­conditions indignes.

Mais cela n’empêche nullement Macron d’organiser, en partenariat avec Ruto, le prochain sommet Afrique-France à Nairobi en 2026.

Paul Martial