C’est par une fraude électorale de grande ampleur qu’Azali Assoumani s’apprête à entamer son troisième mandat alors que des émeutes ont éclaté dans l’archipel contre son coup de force.
Des élections présidentielles et gouvernorales étaient organisées dans l’archipel des Comores regroupant Anjouan, Grande Comore et Mohéli, la quatrième île, Mayotte, restant sous domination française.
La grande triche
Azali Assoumani, le président sortant, recueillerait autour de 63 % tandis que son rival un peu plus de 20 %. Les cinq candidats de l’opposition ont dénoncé des fraudes à grande échelle et ils ne manquent pas d’arguments. Ils soulignent l’écart problématique de la participation, 16 % pour la présidence mais 63 % pour les gouverneurs.
Une vidéo circule largement sur les réseaux sociaux montrant des urnes d’un bureau de vote chargées dans un camion par des militaires accompagnés par le président et les assesseurs. Des cas similaires se sont produits ailleurs. Les partisans du candidat Mohamed Daoud ont arrêté un camion militaire transportant aussi des urnes. Des habitantEs témoignent qu’arrivés à la première heure pour voter, les urnes étaient déjà remplies. Les représentantEs des listes d’opposition n’ont pas eu accès à un grand nombre de bureaux de vote malgré leur accréditation, arrivée pourtant bien tardivement. Par contre les gendarmes étaient présents dans maints lieux de vote de l’île de la Grande Comore, exerçant des pressions sur les votants. Précisons que le responsable de la gendarmerie n’est autre que Loukman Azali, le fils du président.
Les Observateurs de l’Union africaine (UA) ont considéré que la présidentielle s’est « globalement déroulée de manière libre et transparente ». Une mansuétude qui s’explique peut-être par le fait qu’Azali Assoumani est le président de l’UA.
Misère et dictature
Ancien chef d’État-major de l’armée, Assoumani est arrivé au pouvoir en 1999 par un coup d’État. Il s’est fait élire en 2016, puis en 2019 lors d’élections truquées. Que retenir de son bilan si ce n’est qu’il est catastrophique. Les coupures d’eau et d’électricité sont incessantes et l’inflation précarise une population dont déjà la moitié vit en deçà du seuil de pauvreté. L’autre fait marquant est le changement de Constitution qui abroge le système d’une présidence tournante entre les trois îles. Ce qui lui permet incidemment de briguer un troisième mandat.
Dès le début de la campagne électorale, il avait affirmé qu’il gagnerait au premier tour. À cette fin, il a démis Harimia Ahmed, la responsable électorale de la Cour suprême, et s’est opposé au vote des ComorienNEs vivant à l’étranger. Pourtant les transferts de fonds de la diaspora représentent 20 % du PIB. Son seul défaut est celui d’être très majoritairement acquise à l’opposition, dont la plupart des dirigeants sont exilés ou en prison.
Cette répression n’empêche pas les mobilisations contre ce coup d’État électoral. Dans l’archipel, des manifestations et des blocages de routes ont été organisés avec comme seul mot d’ordre : « Azali nalawe »1 !
- 1. Du shikomor : « Azali, dégage ».