Moubarak avait été condamné à la prison à perpétuité pour corruption, mais aussi et surtout pour la mort de quelque 850 manifestantEs lors du soulèvement ayant conduit à sa chute en 2011. Il a été blanchi en appel le 29 novembre de ces deux chefs d’accusation. Moubarak reste en prison en raison d’une précédente condamnation, mais il pourrait être relâché dans le cadre d’une remise de peine ! Une justice inique...
Ses fils, impliqués dans le détournement de plus de 14 millions d’euros, ont également été acquittés. Les accusations qui pesaient sur sept hauts responsables de la sécurité, dont l’ex-ministre de l’Intérieur de Moubarak, ont été abandonnées.Simultanément, 192 membres présumés des Frères musulmans (organisation jugée terroriste par le régime) ont été condamnés à mort, et sept autres condamnations à mort ont été confirmées...Ce pouvoir est dans la continuité du régime de Moubarak. La révolution de 2011 avait seulement destitué la tête du régime. L’essentiel de l’appareil d’État est resté le même : Sissi était lui-même le chef des renseignements militaires de Moubarak, et son actuel Premier ministre était un cadre du parti de Moubarak.Le gouvernement actuel estime visiblement que le moment est venu de tenter de refermer « la parenthèse démocratique » ouverte en 2011.L’irruption de Daesh au niveau international permet à Sissi de se présenter comme le sauveur qui protège l’Égypte du terrorisme… et d’être reçu chaleureusement par François Hollande, malgré l’absence de libertés fondamentales en Égypte et la répression !
La résistance à l’offensive contre-révolutionnaireFace au verdict innocentant Moubarak, plus de mille manifestants ont protesté à côté de la place Tahrir. L’intervention des forces armées causera deux morts, une dizaine de blessés ainsi que des arrestations.Le pays a connu plus de grèves ces deux dernières années que pendant la décennie qui a précédé la révolution. Ainsi les ouvriers d’Alexandrie d’Abboud Spinning Company, en grève depuis deux mois pour des salaires impayés, et qui ont défié à plusieurs reprises la loi restreignant le droit de se rassembler et de manifester. Cependant les luttes restent très locales, et le syndicalisme indépendant du pouvoir a du mal à se structurer.L’un des bastions de la contestation contre le régime reste les universités où les forces révolutionnaires sont présentes, à l’image de la « Coalition des étudiants d’Égypte » qui appelle et organise manifestations et assemblées générales régulières dans les différents campus depuis l’acquittement de l’ancien dictateur.À l’approche du quatrième anniversaire de la révolution le 25 janvier prochain, ces forces ont déclaré vouloir développer les mobilisations. Alors que les forces contre-révolutionnaires sont très présentes et les révolutionnaires réprimés, les organisations progressistes ont demandé à tous ceux qui ont pris part au soulèvement du 25 janvier de retourner dans la rue pour sauver le processus révolutionnaire.Une grande partie de la jeunesse et des travailleurEs reste en effet imperméable aux discours du président égyptien. En effet, le pouvoir militaire n’a ni l’intention ni la volonté de répondre aux attentes et revendications de la population en matière de salaires, logement, chômage et lutte contre la vie chère. Sissi ne pourra pas éternellement maintenir son régime par la répression. Sa fuite en avant répressive ne fera que raviver le feu de la résistance qui demain, la crise aidant, sera au rendez-vous.
Rafik et Thomas