Peut-être va-t-on enfin vers la chute du Premier ministre grec, Kyriakos Mitsotakis, qui sévit depuis trois ans…
A en effet été révélé début août que le dirigeant du Pasok, pourtant robinet d’eau fort tiède, Nikos Androulakis, avait vu son téléphone piégé au profit des services secrets, EYP. Le motif apparent semble avoir été la recherche d’éléments pour monter une affaire contre lui avant le congrès du Pasok et imposer ainsi l’élection du Manuel Valls local, Loverdos, qui aurait apporté le soutien du Pasok à Mitsotakis lors des prochaines élections. Dans la foulée on apprenait le même espionnage contre un journaliste enquêtant sur des affaires sensibles pour le pouvoir.
Espionnage à grande échelle
Puis, on a découvert que EYP espionnait ainsi environ 15 000 personnes, parmi lesquelles des responsables politiques, des syndicalistes, des journalistes… Sans oublier les questions autour de l’assassinat resté mystérieux du journaliste Giorgos Karaïvaz (2021), travaillant sur le crime organisé. Venant après plusieurs scandales récents — dont la libération d’un metteur en scène protégé du pouvoir et condamné pour viols — ce Watergate grec provoque une énorme crise dans la droite : tentant d’écarter sa totale culpabilité, Mitsotakis a dû renvoyer son secrétaire général, Dimitriadis, ainsi que le chef de EYP, imposé par Mitsotakis qui a même fait modifier la loi à cet effet ! Le Premier ministre prétend ne rien avoir su de ces écoutes, discours repris en chœur par la presse très aux ordres puisque achetée par des subventions dont fut exclue la presse d’opposition.
L’entourage ministériel a d’abord joué la démagogie : le peuple grec a des problèmes plus urgents que le téléphone d’Androulakis. Puis l’évocation du complot : la faute à l’Arménie, l’Ukraine (qui ont protesté), la Russie, la Turquie, et bien sûr Syriza ! Malgré tout, le clan au pouvoir ne peut empêcher les procédures parlementaires d’enquêtes sur une affaire aussi grave : la défense visiblement ordonnée par le Premier ministre, c’est d’une part la destruction des preuves à EYP, d’autre part l’omerta, avec refus des responsables impliqués (EYP, une procureure signant les autorisations d’écoutes, Dimitriadis…) de parler. Il n’est pas sûr qu’il puisse continuer ainsi, d’autant qu’une partie de la Nouvelle démocratie (l’ancien Premier ministre Karamanlis, l’ancien président Pavlopoulos…) dénonce les pratiques du clan aux commandes.
État policier et ultra-libéralisme
Cette affaire n’est pas une surprise : nous soulignons depuis 2019 l’orbanisation d’un gouvernement que la presse bourgeoise présentait comme libéral et modéré. Dès l’été 2019 s’est mis en place un État policier s’illustrant par la nomination de ministres connus comme fascistes pas repentis, dont le ministre de l’Intérieur, Voridis, qui a osé déclarer qu’il fallait tout faire pour que plus jamais la gauche ne puisse accéder au pouvoir !
Mais il ne faut pas sous-estimer dans ce dispositif l’affairiste clan familial Mitsotakis : le maire d’Athènes est un neveu de Mitsotakis, Dimitriadis, exécuteur des sales tâches, en est un autre, les deux se préparant peut-être pour la relève… Et la plupart des ministres sont sur la ligne de casse totale des services publics, d’attaques contre les jeunes et les travailleurEs : que ce soit la criminelle politique contre les réfugiéEs (bateaux repoussés, fillette laissée sans soin sur un ilot du fleuve Evros et décédée cet été), que ce soit la répression contre les jeunes (police universitaire...), contre les résistances ouvrières (violences policières contre la grève à l’usine de vins Malamatina), contre les habitantEs d’un quartier (invasion d’Exarcheia par les prétoriens pour imposer la destruction de la célèbre place sous prétexte d’une future station de métro), une très dangereuse fuite en avant se renforce. D’où l’urgence de sortir du cadre parlementaire et de lancer de massives mobilisations pour chasser la droite et sa politique !
À Athènes, A. Sartzekis