Les événements en cours aux frontières gréco-turques sont très inquiétants. Suite à la fermeture des frontières décrétée par le Premier ministre grec Mitsotakis, applaudi par l’Union européenne, ceux qui tentent le passage en Grèce sont violemment repoussés (au moins un mort, peut-être suite à un tir grec, et un enfant noyé sous les yeux des garde-côtes).
Parallèlement, des mesures extrémistes sont prises contre les réfugiéEs : suspension pour un mois des procédures d’examen du droit à l’asile, décision de renvoyer dans le « pays de provenance » touTEs les migrantEs arrivés ces derniers jours et sans titre de réfugié, avec construction de deux camps spécifiques près d’aéroports. Ce dimanche, annonce de l’arrêt du versement d’une aide financière aux réfugiéEs, et le projet de centres fermés sur des îles désertes a vu le jour…
Si l’armée et la police sont en action pour « défendre les frontières » face à ce que des ministres d’extrême droite nomment « l’invasion des immigrés clandestins », le climat nationaliste et raciste a aussi permis que s’organisent des patrouilles de pseudo garde-frontières sur les îles et le long du fleuve Evros, épaulés par des nervis fascistes grecs et étrangers frappant migrantEs et personnes solidaires, ou incendiant des lieux pour réfugiéEs. Des nazis allemands revendiquant les massacres d’Hitler contre la population grecque sont protégés par la police contre les antifascistes. Résultat du climat d’hystérie nationaliste encouragé par les médias dominants, deux sondages indiquent que 90 % des Grecs approuvent la ligne dure du gouvernement.
Climat malsain et contradictions à droite
On connaît les deux causes de cette flambée, sur fond d’Europe forteresse : la décision machiavélique d’Erdogan de suspendre l’infâme traité de 2016 avec l’UE visant à enfermer 3 à 4 millions de réfugiéEs en Turquie, et l’exaspération des réfugiéEs enfermés dans des camps surpeuplés et insalubres de quelques îles grecques (plus de 20 000 à Moria–Lesbos, pour 3 000 places) ainsi que des habitants de ces îles où le gouvernement souhaite maintenir ces réfugiéEs, avec comme projet des camps fermés en pleine île, plutôt que laisser les réfugiéEs rejoindre le continent. Ces derniers mois, la colère insulaire est montée, avec des exigences de transferts vers le continent et le refus des camps fermés. Une situation confuse en a résulté, propice à des infiltrations fascistes avec attaques de réfugiéEs et d’ONG. Mais on voit aussi des tentatives de revendications communes aux insulaires et aux réfugiéEs. D’où des contradictions à droite, le président de la région s’opposant au gouvernement qui a envoyé les CRS à Lesbos matraquer tout le monde… et se faire repousser. Dans cette situation très tendue, la gauche débat de la nécessité d’aller ou pas aux rassemblements insulaires : une bonne partie pense que oui, justement pour lutter contre le racisme impulsé par des fascistes minoritaires sur une île aux traditions démocratiques comme Lesbos.
Riposte antiraciste européenne !
L’actuel climat nauséabond commence à faire réagir : même à droite, certains s’inquiètent de voir Mitsotakis laisser agir les fascistes locaux et européens ainsi que les milices (dimanche, un de ces guignols aurait tiré sur un policier pris pour un migrant !). Un appel de 66 ONG est paru, dénonçant les mesures illégales, exigeant le respect des droits des réfugiéEs, la protection des personnes solidaires et la libre installation en Europe. Et, alors que la direction de Syriza demande le retour à l’accord de 2016, la gauche anticapitaliste a lancé un début de riposte nationale, avec jeudi une grosse manifestation à Athènes (pas loin de 10 000), et des défilés dans huit autres villes du pays, avec un appel de la jeunesse de Syriza à se mobiliser. L’exigence capitale, c’est celle de l’ouverture immédiate des frontières européennes, qui doit être un objectif prioritaire pour toute la gauche européenne. Et qui pourrait se traduire, pour les municipales en France, par la revendication « Installation immédiate de réfugiéEs dans la commune » ?
À Athènes