Dimanche 6 avril, les élections législatives hongroises ont vu la victoire de la droite et une percée sans précédent de l’extrême droite. Les jours sombres continuent à l’ombre de l’Union européenne. Les élections étaient « libres », dans la mesure où le secret du vote n’a pas été violé, « mais non équitables », ceci en raison de l’instrumentalisation des médias publics au profit quasi exclusif du parti au pouvoir ou encore du charcutage des circonscriptions ; sans même parler de l’administration, mise au service d’intérêts partisans de ceux qui gouvernent... C’est à ce constat qu’a abouti une enquête de l’OSCE concernant les dernières élections législatives.Celles-ci ont abouti à une majorité des deux tiers du Parlement pour le seul Fidesz, le parti de droite du Premier ministre Viktor Orban, au pouvoir depuis 2010. Cette majorité écrasante en sièges a été obtenue avec un nombre inférieur de voix pour le Fidesz, comparé aux années 2002 et 2006... où ce même parti avait perdu les élections ! Avec 44,5 % des suffrages obtenus par ce parti, ce dernier reste la première force politique, mais connaît une baisse : il y a quatre ans, il avait encore obtenu 52,7 %.Lors de la précédente mandature, il avait déjà eu une majorité des deux tiers, ce qui lui avait permis de faire passer 850 textes de loi sans aucun débat parlementaire... Récemment, le nombre de sièges au Parlement a été réduit de moitié (à 199) et celui des circonscriptions de 176 à 106, tout en les redécoupant sur mesure de façon à diluer le vote pour le centre-gauche, et avoir une majorité de droite.Néanmoins, le Parti populaire européen, la fédération des partis de la droite conservatrice et chrétienne-démocrate de l’Union européenne, s’est bruyamment félicité du résultat de cette élection. Dans un communiqué, le PPE s’est félicité de « la façon impressionnante dont Viktor Orban a su gagner à nouveau la confiance » de ces concitoyens... La droite européenne a même ajouté qu’ainsi « le parti d’extrême droite Jobbik n’a aucune chance de mettre en œuvre ses idées extrémistes ». Rien n’est moins sûr.Lourdes menacesLe Jobbik progresse considérablement en voix, passant de 17 % il y a quatre ans, à 20,66 %, ce qui fait de lui l’un des partis d’extrême droite les plus influents du continent. Et non seulement, certaines nominations du pouvoir, par exemple à la tête du Nouveau Théâtre de Budapest en 2011, profitent délibérément au parti fasciste. Mais aussi et surtout, le Fidesz et le Jobbik défendent souvent les mêmes idées et votent parfois les mêmes textes de loi. Ainsi en novembre 2013, les deux partis ont communément adopté un texte qui supprime toute limitation de durée de la détention provisoire en Hongrie...A la fin de la semaine dernière, un nouveau scandale a éclaté, avec l’inauguration d’un monument commémorant la Hongrie de 1944… présenté uniquement comme un pays occupé, et passant sous un silence absolu le rôle actif de la police et des milices hongroises dans la déportation de 450 000 juifs. Certes, le Jobbik va plus loin. Le 9 février, il a commémoré, comme tous les ans, l’offensive commune (prétendument héroïque) des forces de la Hongrie fasciste de l’amiral Horthy et de l’Allemagne nazie pour briser l’encerclement par l’Armée rouge de l’URSS. Les 5 et 19 novembre 2013, des militants du Jobbik ont aussi inauguré deux statues à la gloire de l’amiral Horthy, dans une église puis sur une place publique.Dans cette situation, avec 25,73 %, la coalition du centre et de la gauche reste vaincue et mal organisée. Il pèse sur elle un double héritage qui la discrédite aux yeux de nombreux et nombreuses HongroisEs : le poids du stalininisme, puis celui de la politique néolibérale des gouvernements sociaux-démocrates des vingt dernières années. Bertold du Ryon