En Italie, les mobilisations étudiantes prennent de plus en plus d’ampleur et sont d’autant plus médiatisées qu’elles se greffent sur la crise du gouvernement Berlusconi. Les étudiants protestent contre le projet de loi Gelmini qui privatise les campus, coupe les subventions à la recherche, licencie des enseignants et condamne tout une génération à la précarité. Ils sont aux côtés de professeurs, de chercheurs et de précaires des universités et prennent conscience de la nécessité de croiser les luttes contre la réforme avec celles des immigrés, la défense des services publics, les comités écologistes et les luttes des travailleurs. Le 24 novembre, pendant le débat sur le projet de loi au Parlement, des milliers d’étudiants, de chercheurs et de professeurs manifestaient. À Rome « l’assaut » du Parlement a été un acte symbolique mettant en évidence le décalage entre la politique des représentants qui jouent une partie politicienne et la politique des représentés qui jouent leur avenir. « Le parlement ne se préoccupe que de ce qui est bénéfique à cette classe politique dans une optique de subordination de la recherche et de l’enseignement public aux exigences du marchés et des entreprises privées » ont déclaré les étudiants après l’assaut. Le message qui émerge des cortèges, des contestations face aux représentants du gouvernement, y compris contre Berlusconi en personne à Naples, des écoles et universités occupées, est qu’il n’y pas que l’enseignement qui est en jeu : un pays tout entier subit le poids d’une droite qui continue de favoriser les intérêts de la Cofindustria [le Medef local, NdT], à privatiser les services publics, à attaquer les travailleurs – un rapport sur le travail vient d’être adopté, et aura des répercussions dramatiques sur les travailleurs. L’assaut du Sénat a représenté une preuve de démocratie, déplaçant l’attention publique des feuilletons internes de la politique, des scandales du Premier [surnom du chef du gouvernement, NdT], des ragots parlementaires, vers les situations réelles des Italiens, vers les besoins matériels qui depuis longtemps ne sont plus représentés par les institutions, quelle que soit leur couleur. Le projet de loi Gelmini n’est que le dernier acte d’un démantèlement constant de l’enseignement public auquel se sont attelés tour à tour des gouvernements de tous bords.La solidarité de tant de leaders de l’opposition, depuis Bersani du PD [coalition de centre-gauche, NdT] à Nichi Vendola, leader du SEL [Gauche écologiste, NdT] et futur candidat aux prochaines élections, qui tentent tout pour se faire photographier sur les toits avec les étudiants en lutte, apparaît bien hypocrite, alors qu’ils n’ont jamais concrétisé leurs promesses quand ils étaient au pouvoir. Grâce notamment aux luttes, le vote de la réforme Gelmini a été reporté au 30 novembre. Mais pour abattre cette réforme, cette effervescence doit se transformer en « Mouvement », et pour cela, il faut développer des connexions de plus en plus grandes avec les autres secteurs. Un front unique et social qui donne un coup final au gouvernement Berlusconi et une leçon à la politique de centre-gauche qui ne représente plus les besoins de notre classe depuis des années et qui a remis un pays et le monopole idéologico-culturel aux mains de la droite berlusconienne. Si les étudiants, les immigrés, les luttes locales, les travailleurs, se retrouvent devant Montecitorio [Palais où siège l’Assemblée nationale, NdT] le 14 décembre, jour du vote de confiance au gouvernement, et unissent réellement leurs luttes, on pourrait vraiment gagner. Laura Emiliani, Sinistra Critica