Depuis plusieurs semaines, l’Italie a un nouveau gouvernement présidé par Matteo Renzi, le secrétaire du Parti Démocratique (PD), parti social-libéral qui dirige une large coalition composée, en plus du PD, de deux petits partis bourgeois du centre (SC et UDC) et un parti de droite (NCD).
Ce gouvernement est soutenu aussi de fait par Forza Italia, le parti de Berlusconi qui a réalisé un accord fait sur mesure avec Renzi pour exclure de la représentation parlementaire les forces de gauche. La principale opposition parlementaire est représentée par le Mouvement cinq étoiles de Beppe Grillo, une force interclassiste qui mène surtout bataille contre les privilèges de la « caste politique », avec des objectifs programmatiques changeants et contradictoires.
Renzi, la continuitéRenzi met en place une nouvelle phase de la politique d’austérité, après celles qui ont été développées depuis 2001, dont le bilan a été trois millions de chômeurs, un taux de chômage chez les jeunes de 40 %, neuf millions de pauvres, un million de personnes qui accèdent difficilement aux services de santé, et le démantèlement progressif de l’État social, des services publics et du vieux système des retraites.Le programme du gouvernement constitue un nouvel approfondissement de la politique d’austérité, soutenu par les médias et opposant un secteur social à un autre, tout en faisant des promesses ambiguës ou fausses. Renzi se présente comme celui qui veut modifier les choix de l’Union européenne, alors qu’il accepte totalement les politiques d’austérité, le pacte fiscal et le chantage de la dette.L’action du gouvernement se caractérise par une nouvelle libéralisation complète du marché du travail et par une attaque sans précédent contre les dépenses et les services publics. Résultat : des dizaines de milliers de licenciements, de nouvelles réductions fiscales importantes pour les patrons, combinées avec quelques promesses de baisse des impôts, y compris pour les travailleurs, un programme de privatisations des entreprises publiques et la vente de biens de l’État pour « payer la dette ». Par contre, aucun plan pour l’emploi !La situation est encore plus difficile pour la classe ouvrière parce que les trois grands syndicats ont signé un accord avec la Confindustria (le Medef italien) qui prévoit la subordination totale aux choix des entrepreneurs, la casse des conventions nationales et un système répressif de sanctions pour les syndicats, les délégués syndicaux et les travailleurs qui voudraient engager de vraies initiatives de lutte contre les patrons.Jusqu’à présent, il y a eu de nombreuses luttes dans des entreprises différentes pour la défense de l’emploi ou des luttes locales pour la défense de l’environnement ou des services publics, mais il n’y a eu aucun mouvement unitaire et global.
Pour une Europe anticapitaliste et internationalisteC’est dans ce cadre que pour les élections européennes, à l’initiative de quelques intellectuels, il y a eu une tentative de mettre en place une liste rassemblant les forces de la gauche (actuellement en grande difficulté et très affaiblie) avec des représentants des mouvements sociaux, écologistes et démocratiques, exprimant le refus de l’actuelle politique économique européenne et opposée aux replis nationalistes.La liste s’appelle : « L’autre Europe avec Tsipras », avec l’intervention de Tsipras, dirigeant de Syriza, et en référence aux luttes menées en Grèce par les travailleurs et travailleuses. Elle présente beaucoup d’ambiguïtés et de contradictions parce qu’elle brasse des positions diverses. Certaines (dont Rifondazione Comunista, ainsi qu’une partie des intellectuels) avancent un programme néokeynesien assez radical contre les politiques européennes d’austérité. D’autres sont clairement modérées, comme celles du Parti de Vendola (SEL) qui depuis toujours cherche un accord avec le PD, ainsi que celles d’une autre partie des intellectuels qui pensent pouvoir utiliser la liste pour construire un rapport de forces plus favorable avec les social-libéraux. Globalement, ce qui émerge est une proposition de réforme de l’actuelle Union européenne.Malgré ces limites évidentes et les fortes ambiguïtés politiques, la liste apparaît, au milieu du désert politique italien, comme une position alternative de gauche et en tant que telle est considérée comme utilisable par des secteurs de travailleurs et de militants qui animent différents mouvements de résistance sociale. Dans ce cadre, Sinistra Anticapitalista a estimé que les conditions politiques et programmatiques permettant sa participation n’étaient pas réunies, mais a décidé de donner une consigne de vote pour les candidats de cette liste qui expriment des positions anticapitalistes et ont dirigé des luttes significatives.Notre organisation est en train de développer sa propre campagne politique pour les élections européennes, avec une orientation anticapitaliste et internationaliste, contre les politiques d’austérité, contre l’Europe du pacte fiscal, pour l’unité des luttes des travailleurEs, pour l’opposition au gouvernement Renzi. La campagne a déjà eu une première initiative nationale à Rome dimanche 13 avril, un meeting avec la participation de camarades français, grecs et de l’état espagnol, et bien sûr avec des représentantEs et des militantEs des luttes sociales en Italie.
De Rome, Franco Turigliatto (Sinistra anticapitalista)Traduit par Ross Harrold