Fin 2011, à propos des orientations de la déclaration gouvernementale, un responsable syndical belge affirma : « Parler de gouvernement de gauche ou de droite n’a plus de sens puisque ce sera avant tout un gouvernement européen, un gouvernement qui sera contraint de faire ce que lui impose l’Europe. » L’Union européenne « austéritaire » « Austéritaire », voilà bien le néologisme approprié pour qualifier l’orientation générale des décisions politiques européennes face à la crise financière. Tout y est fondé à la fois sur l’austérité budgétaire dans tous les domaines et sur un contournement des dispositifs démocratiques d’un certain nombre d’États membres de l’Union européenne. Par l’inscription dans les Constitutions nationales de l’équilibre obligatoire en matière de déficit budgétaire et de dette publique, les gouvernements européens piétinent la démocratie et décident de se soumettre définitivement aux règles du marché et à l’oligarchie financière. En effet, le fait que les parlements nationaux élaborent les lois et votent les budgets nationaux constituent un principe démocratique de base. Avec ce pacte, c’est la Commission européenne qui décidera des orientations budgétaires des États membres. Les élections nationales, permettant aux citoyens de décider d’un programme politique et de la société qu’ils veulent construire, deviennent donc inutiles. De Merkozy à Merkollande, de l’austérité à la croissance ? La proposition du gouvernement Hollande d’accompagner le pacte budgétaire d’un volet supplémentaire portant sur une politique de relance de la croissance, au contraire d’être saluée comme une avancée significative, doit être dénoncée fermement.
Mario Draghi, le président de la Banque centrale européenne, lui a rapidement emboîté le pas en proposant un nouveau « pacte pour la croissance ». En reprenant le mot d’ordre de la dernière manifestation européenne (« Pour l’emploi et la croissance ») initiée par la Confédération européenne des syndicats (CES), les tenants de cette proposition cherchent à amadouer la colère des peuples face aux politiques. Cependant, dès que l’on creuse un peu de quoi pourrait être fait ce pacte de croissance, le masque tombe assez rapidement. En effet, M. Draghi continue de prôner « la flexibilité du travail et une saine gestion ». Le président de la BCE veut le faire « non pas en relançant la demande européenne, […] mais plutôt par la promotion de réformes structurelles […] censées « faciliter entrepreneuriat, l’établissement de nouvelles entreprises et la création d’emplois ». Il ne s’agit donc en rien de desserrer l’étau budgétaire mais de procéder à la mise en place de mesures visant à augmenter la concurrence interne entre travailleurs de l’UE.
Pour les défenseurs du pacte budgétaire, cet éventuel pacte de croissance ne pourra entraîner aucune dépense supplémentaire pour l’État. Il s’agit au contraire de profiter de la crise pour renforcer les mesures néolibérales : travailler plus longtemps, augmenter l’âge de la retraite, flexibiliser le marché du travail, faciliter le recours au travail à temps partiel et à l’intérim, supprimer les statuts, diminuer les cotisations sociales… Tous, nous mesurons déjà l’ampleur de l’austérité imposée aux peuples par les mesures actuelles. Le Portugal, l’Espagne et surtout la Grèce nous donnent un aperçu de ce que produirait une austérité encore accrue… Il ne faut donc pas tomber dans le piège consistant à tolérer la mise en œuvre de politiques d’austérité permanente, en échange de pseudo-plans de relance camouflant très mal des attaques supplémentaires contre les droits des salariés et allocataires sociaux en Europe.
J. C., résumé d’un excellent texte de camarades belges disponible sur : http://www.cepag.be/sites/default/files/publications/gouvernance_economique_europeenne_-_40.542_s.pdf