La guerre des deux généraux s’intensifie, laissant le pays et les populations exsangues alors que la diplomatie internationale se gargarise de phrases creuses
Les fortes précipitations pendant la saison des pluies, renforcées par le dérèglement climatique, ont provoqué de nombreuses inondations qui ont aggravé la situation déjà très précaire des populations. Autre conséquence : les routes et pistes impraticables ont figéles lignes de front de la guerre entre les Rapid Support Forces (RSF) de Hemedti et les Sudanese Armed Forces (SAF) dirigées par Al-Burhan.
Reprise des offensives
Depuis 17 mois de guerre, la quasi-totalité du pays a été touchée. Les RSF contrôlent la zone ouest et les SAF les parties sud et est. Avec le début de la saison sèche, les grandes offensives reprennent. Les FAS tentent de reconquérir la capitale Khartoum qui est en presque totalité aux mains des partisans d’Hemedti. Quant à ces derniers, ils ont lancé une attaque massive sur la ville d’El Fasher, capitale historique du Darfour. Au vu des massacres et des pillages dont ils se sont rendus coupables, une partie des civilEs a fait le choix de prendre les armes aux côtés des FAS pour défendre leur ville. D’autres groupes armés ont aussi joint leurs forces comme le SLM-Minawi (Sudan Liberation Army-Minawi), le JEM, des éléments du SLM-TC (Sudan Liberation Movement-Transitional Council), et des milices locales. Une alliance hétéroclite unie seulement par leur opposition aux RSF.
Ces manœuvres sont importantes pour chaque camp. La conquête de la capitale ne pourra que conforter Al-Burhan dans sa stature d’autorité légitime du Soudan, pour Hemedti, gagner El Fasher revient à contrôler l’ensemble du Darfour. Ces offensives signifient aussi que les deux généraux ont adopté une stratégie de guerre totale impliquant la destruction des infrastructures du pays, les hôpitaux, les écoles, les ponts, les aéroports, etc.
Discours hypocrites
Ainsi les deux camps utilisent l’artillerie lourde sur des zones densément peuplées. On compte désormais au bas mot 150 000 victimes. Près de 12 millions de déplacéEs et 25 millions de SoudanaisEs sont confrontéEs à une crise alimentaire aiguë.
Les efforts diplomatiques entrepris par les USA tournent au grotesque. Après le flop de sa conférence de Genève, Biden a signé avec Ben Zayed Al Nahyane président des Émirats arabes unis (EAU), une déclaration soulignant que « les deux dirigeants se sont déclarés alarmés par les millions de personnes déplacées par la guerre, les centaines de milliers de personnes souffrant de famine et les atrocités commises par les belligérants contre la population civile. Ils ont souligné qu’il ne peut y avoir de solution militaire au conflit au Soudan ». Alors que les EAU sont les principaux soutiens et pourvoyeurs d’armes des RSF.
S’il y a peu d’empressement de la part des pays voisins du Soudan tout comme du reste de la communauté internationale à mettre fin au conflit, c’est que cette guerre a au moins un avantage pour eux, celui d’avoir écrasé une révolution dont la dynamique émancipatrice remettait en cause l’ordre établi.
Paul Martial