Réunie le vendredi 13 avril, la commission administrative1 de la Fédération générale de l’enseignement secondaire (FGESEC)2, a décidé l’arrêt de travail pour une durée indéterminée dans tous les lycées et collèges de Tunisie à partir de mardi 17 avril.
La FGESEC inscrit ses revendications dans une perspective globale, consistant à inverser le processus actuel de délitement de l’école publique, grâce à une réforme en profondeur avec plus de moyens humains et financiers, notamment :
– l’ouverture de négociations pour une réforme globale de l’éducation publique ;
– l’application de l’accord du 21 octobre 2011, qui classe le métier d’enseignant parmi les métiers pénibles ;
– l’augmentation du montant des primes spécifiques ;
– un départ à la retraite à partir de l’âge de 55 ans, sur la base de 30 années de travail.
Une lutte de longue haleine
Face à ces revendications, le gouvernement fait la sourde oreille. Alors, pour faire entendre leurs voix, les enseignantEs ont engagé, depuis décembre, une série d’actions, notamment : trois grèves nationales en décembre, en février et en mars, des rassemblements régionaux et nationaux, et une grande manifestation nationale. Ils avaient aussi décidé, depuis le 11 janvier dernier, de « retenir » les notes des examens et de ne pas les remettre à l’administration.
Ce bras de fer ne doit pas pour autant être l’arbre qui cache la forêt. L’actuel chef du gouvernement a été propulsé au sommet de l’exécutif, en août 2016, avec pour mission principale l’application d’un nouveau programme, exigé par le FMI, d’une durée de quatre ans. Les différents programmes du FMI (1987, 2013 et 2016) n’ont fait qu’appauvrir davantage les classes laborieuses ainsi que l’État, pour enrichir davantage une minorité de riches.
Refus d’une politique globale
La mobilisation des enseignantEs exprime, au-delà de leurs revendications propres, un refus total de la politique de fuite en avant qui se poursuit depuis 2011. C’est un refus catégorique de la mort lente de l’école et de l’ensemble des services publics, du sabotage des entreprises publiques et du système de sécurité sociale, de la dégradation continue du pouvoir d’achat des salariéEs et des classes populaires... exigés par le FMI. C’est bien de tout cela qu’il s’agit à travers l’actuel bras de fer entre l’Union générale tunisienne du travail et le gouvernement de Chahed.
Jusqu’à présent, ni la révolution de 2011, ni les élections démocratiques de 2011 et 2014, ni même les milliers d’actions et de luttes menées au cours des dernières années par les salariéEs, les chômeurEs et les déshéritéEs, etc., n’ont réussi à libérer la Tunisie des griffes de la dictature des institutions financières internationales et du néocolonialisme.
Mais ce qui est admirable dans le mouvement social et syndical tunisien est sa volonté et sa capacité à se redresser de nouveau, malgré tous les obstacles auxquels il fait face, et de continuer la lutte pour arracher ses droits. L’enjeu est aujourd’hui de taille : il s’agit, ni plus ni moins de donner une chance réelle à la Tunisie ! Parions sur la victoire sociale !
Fathi Chamkhi (député et membre dirigeant du Front populaire et de la Ligue de la gauche ouvrière)