SolidaritéS Vaud participe avec d’autres forces, dont le POP, la Grève du Climat, et Décroissance-Alternatives, au lancement d’une initiative cantonale pour la gratuité des transports publics. Entretien avec notre camarade Franziska Meinherz.
Quelle est l’idée principale de cette initiative ?
Sur le papier, les transports publics, mais aussi la construction et le maintien des routes, font partie du service public. Et pour une bonne raison : pouvoir se déplacer est une condition de base pour pouvoir aller travailler, se former, et participer à la vie sociale et culturelle. Mais dans la réalité, aujourd’hui, se déplacer a un coût considérable. En moyenne, les dépenses liées aux transports publics s’élèvent à 7,7 % du budget des ménages suisses. Et ce n’est pas seulement le prix des billets qui augmente d’année en année : entre 2012 et 2017, le nombre de personnes qui voyagent sans titre de transport valable a augmenté de 25 %, ce qui montre qu’il y a toujours plus de personnes qui peinent à payer leurs déplacements.
Avec cette initiative, dans un premier temps, nous voulons que la mobilité soit reconnue pour ce qu’elle est : un service public de base. Avec la gratuité des transports publics, chaque personne aura recours à un moyen de transport qui lui permet de se déplacer dans la région, quelle que soit sa situation financière. Dans un deuxième temps, avec cette initiative, nous nous attaquons à l’empreinte écologique de la mobilité, qui est responsable d’un tiers des émissions de gaz à effet de serre domestiques de la Suisse.
En rendant gratuits les transports publics, nous éliminons le frein financier qui peut aujourd’hui détourner des personnes de les prendre. Notamment des personnes qui subissent déjà les coûts fixes d’une voiture tendent à renoncer à prendre les transports publics même pour des déplacements où ce serait possible, pour ne pas en plus subir le coût d’un abonnement ou d’un billet. Les villes françaises et belges qui ont déjà instauré la gratuité des transports publics ont effectivement observé qu’une large majorité des nouvelles et nouveaux usagerEs étaient des personnes qui avant se déplaçaient en voiture. En plus, 10 % d’entre elles et eux ont vendu leur voiture ou renoncé à en acheter une nouvelle.
La question du financement de cette « gratuité » est évidemment cruciale. Qu’est-ce qui est prévu ?
Nous estimons que la gratuité des transports publics dans le canton coûterait environ 300 à 350 millions de francs par an. Ce chiffre peut – et doit – augmenter un peu : avec la gratuité, la demande va augmenter, ce qui va nécessiter d’acheter davantage de rames et d’employer davantage de personnel. En plus, nous voulons que les transports publics soient de qualité et desservent aussi les lieux excentrés, aujourd’hui souvent pas très bien connectés.
Il y a largement assez d’argent pour financer cela : chaque année, depuis 15 ans, le canton de Vaud dégage des excédents budgétaires bruts qui ont généralement dépassé le montant d’environ 500 millions de francs. Nous demandons que cet argent, constitué par nos impôts, soit mis à notre service, en nous permettant de nous déplacer dans la région de manière écologique, et indépendamment de notre situation financière. Par ailleurs, nous proposons aussi de financer la gratuité via une augmentation de l’impôt sur le bénéfice des entreprises. Cette augmentation toucherait principalement les grandes entreprises, qui génèrent de grands flux pendulaires : il nous paraît évident que ces entreprises doivent contribuer au financement du réseau de transport qui permet à leurs employéEs de venir travailler.
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