Les gesticulations de la diplomatie française sont loin de faciliter la mobilisation populaire en solidarité avec un peuple qui appelle pourtant à l’aide internationale depuis plus de deux ans.Pour comprendre ce « jeu », il faut rappeler que l’impérialisme français a toujours considéré le Moyen-Orient comme sa deuxième aire d’influence après l’Afrique, essentielle à l’achat et au transport de matières premières, et à la vente d’armements.Négociations inutiles, pressions inefficacesQuand l’insurrection a commencé en Syrie, le gouvernement français espérait tirer son épingle du jeu, en soutenant les opposants pour obtenir que le régime d’Assad se réforme et devienne plus conciliant à tout point de vue (comme sur le Liban). Face à son durcissement sauvage, il prend la tête de la condamnation des atteintes aux droits de l’homme et de la prise des sanctions économiques contre ses dirigeants, mais s’alarme des risques de déstabilisation globale d’une région hautement sensible.En 2012, les cercles diplomatiques se sont agités. Il s’agissait en premier lieu d’obtenir que l’opposition syrienne se dote d’une façade d’unité et de responsabilité pour négocier un arrangement, et d’autre part d’obtenir du pouvoir russe de Poutine qu’il fasse pression pour un changement partiel du régime syrien. Toutes ces tentatives se sont heurtées à la férocité de la répression menée par Assad qui a coupé toute possibilité de transiger sur son départ. Sur le terrain, les coordinations populaires ont continué à organiser les manifestations, mais aussi la survie quotidienne et la défense armée du peuple révolté, sans reconnaître beaucoup d’autorité à l’opposition en exil. En même temps, le pouvoir russe et surtout le pouvoir iranien, ont fait de la défense du régime syrien un élément essentiel de la relance de leur puissance internationale.Succédant à un Sarkozy qui jouit de son « succès » libyen, Hollande et son ministre des Affaires étrangères Fabius, peuvent être les plus zélés à protester contre les crimes du régime syrien, d’autant plus que les journalistes français se sont exposés au péril de leur vie pour les mettre en lumière. Dans les faits, à la tête d’un pays en crise, le gouvernement français limite son aide, même humanitaire au minimum : 13 millions d’euros en 2012, soit à peine plus d’1 euro par syrien, considéré par les instances de l’ONU comme en « détresse humanitaire ». Solidarité du mouvement ouvrier et démocratiqueAux côtés des autres gouvernements européens, l’État français trouve toujours de bonnes raisons pour ne pas livrer des armes, et surtout les roquettes de défense antiaérienne et antichars que demande le peuple syrien bombardé quotidiennement. Sa manière d’agiter cette possibilité sans la concrétiser, de privilégier une « négociation sérieuse pour la paix » à Genève ne fait que pousser un Assad conforté par ses alliés russes, iraniens et libanais à accélérer son offensive criminelle contre son peuple.Dans ce jeu pervers, les monarchies intégristes du Golfe livrent des armes – au compte-gouttes – à leurs obligés, donnant ainsi des arguments aux puissances occidentales (à qui elles sont pourtant alliées contre « la menace terroriste »), et à Bachar el-Assad pour confessionnaliser sa guerre civile. Pour couronner le tout, le gouvernement français a rétabli le visa de transit obligatoire pour les Syriens, contribuant ainsi à les empêcher de fuir la mort et de se mettre à l'abri, alors que la Turquie, la Jordanie, l’Irak et le Liban en accueillent plus d’un million et demi.Face à cette situation, la responsabilité du mouvement ouvrier et démocratique international est de réclamer que nos gouvernements fournissent immédiatement des armes à l’Armée syrienne libre qui est mandatée par la révolution syrienne pour la défendre. La méfiance justifiée de toute intervention directe impérialiste ne doit pas conduire à l’abandon du peuple syrien, mais à la volonté de contrôler démocratiquement ces fournitures, comme celles d’une aide humanitaire renforcée.Notre responsabilité est d’ores et déjà d’apporter toute l’aide possible aux insurgés, de société civile à société civile, et de défendre l’accueil des réfugiés syriens qui parviennent à entrer dans une forteresse européenne moins que jamais au service des peuples.Jacques Babel
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