Après seulement un mois de gouvernement, le président Milei range dans un tiroir sa principale promesse de campagne : faire payer la crise économique par la caste politique. Ce sont bel et bien les travailleurEs, à commencer par les plus pauvres, qui payent le prix de l’austérité.
La principale mesure prise a été de dévaluer fortement la monnaie et de libérer les prix. Le résultat est une inflation de 25 % au mois de décembre, sans qu’on puisse entrevoir une diminution de celle-ci dans les prochains mois. Un seul exemple permet de l’illustrer : l’augmentation du prix des carburants fin décembre enclenchera une nouvelle spirale inflationniste et risque d’obliger à une nouvelle dévaluation, pour enclencher un troisième tour d’augmentations des prix. Pourtant son gouvernement aurait pu négocier avec la petite poignée d’entreprises pétrolières pour au moins échelonner l’augmentation. Mais son dogmatisme libéral le pousse à éviter toute intervention de l’État, même si ceci implique de modérer l’impact de ses mesures et de mettre en péril le succès de son plan économique. Son plan perd une dose de cohérence interne, tout en gardant son côté injuste.
Le projet de Milei : changer le pays à jamais
Cependant Milei ne se contente pas des mesures de court terme. Dans la foulée, il essaye de changer le pays à jamais : privatisation de toutes les entreprises publiques, dérogations aux lois de protection de la nature, dérégulation de tous les secteurs économiques, pour ne nommer que les points saillants. En tout, des centaines de modifications légales avec un méga-projet de loi et un décret présidentiel.
Ceux-ci doivent passer maintenant par l’Assemblée. Ce n’est toujours pas clair ce que feront le Parti radical (aujourd’hui de centre-droite) et les péronistes non alignés avec le kirchnérisme. Concernant le décret, au début ils se disaient contre, mais aujourd’hui leur opposition est de plus en plus tiède. Néanmoins, certains volets, notamment celui de la réforme du droit du travail, ont été suspendus provisoirement par la justice, constituant un premier revers pour le gouvernement. La Cour suprême de Justice doit se prononcer sur la constitutionnalité du décret.
Le projet de loi est débattu depuis le 9 janvier. Au début, le gouvernement ne voulait rien négocier, mais pour en faire approuver au moins une partie significative, ils ont été obligés de proposer des modifications. La dérégulation de la pêche a été modifiée face aux pressions du secteur, l’article obligeant une autorisation à toute réunion publique de plus de trois personnes va être retirée. Même la réforme électorale concernant les législatives va être modifiée, voire arrêtée. Cette dernière était très critiquée car, d’une élection à la proportionnelle directe par région, elle passait à une élection uninominale par circonscription. Un autre point, source de grandes critiques, est celui de la déclaration de l’urgence économique, qui donne les pleins pouvoirs au président pendant deux ans minimum, c’est-à-dire plus de pouvoirs et pendant plus de temps que lors de la pandémie de coronavirus.
Grève nationale le 24 janvier et solidarité internationale
Le résultat législatif et judiciaire est incertain. C’est la rue qui va changer la donne. Les casserolades, même si elles sont modestes, ont émergé depuis l’annonce du décret, et dans quelques quartiers de la capitale des assemblées populaires (comme celles de 2001) commencent à voir le jour. Mais le plus important est la grève nationale du 24 janvier. La bureaucratie syndicale (beaucoup plus puissante que la française) semble se réveiller d’un sommeil de quatre ans et appelle à une grève générale d’un jour tout en interpellant le péronisme (notamment l’ancienne présidente Cristina Kirchner et le candidat perdant de la dernière présidentielle Sergio Massa) pour agir. Cette journée de grève et de mobilisation peut être le début d’une opposition sociale solide aux politiques libérales de Milei. Ici, en France, à l’appel de l’ACAF (Assemblée des citoyens argentins en France), de FAL (France Amérique latine) et de syndicats français (CFDT, CGT, FO, FSU, UNSA et Solidaires) un rassemblement est prévu le 24 janvier à 18 heures devant l’ambassade argentine à Paris (angle de la rue Cimarosa et de l’avenue Kléber, 75016 Paris — Métro 6 : Boissière). Pour que vive la solidarité internationale face aux attaques des capitalistes !