Au moment où nous écrivons ces lignes, nous apprenons que l’Ordre des médecins attaque une professionnelle exerçant auprès de personnes trans1. Son crime ? Avoir prescrit un traitement hormonal à une personne trans majeure, ce que la famille de cette dernière n’accepte pas. Bien que le Conseil départemental de l’Ordre des médecins ait établi dans un rapport que la plainte n’avait aucun fondement légal, le CNOM (le conseil national) a décidé de maintenir sa plainte.
Pratiques maltraitantes et dangereuses
À travers cette plainte, c’est la pratique d’initiations de traitements hormonaux qui est ciblée, c’est le libre choix du médecin par son ou sa patientE qui est attaquée. Comme l’écrit à juste titre le Réseau Santé Trans, cette plainte « démontre une volonté des hautes instances de santé de compliquer et psychiatriser les parcours des personnes transgenres. » Retarder l’accès aux traitements hormonaux, c’est retarder la possibilité de vivre au quotidien dans son genre de destination, de « cispasser »2 sans risquer les agressions. Les hautes instances de santé s’appuient sur les préconisations de la SOFECT, collège de médecins qui s’est arrogé un monopole de la prise en charge des personnes trans.
La SOFECT est dénoncée depuis des années par les associations trans pour ses pratiques maltraitantes et dangereuses. Elle mène un travail de lobbying intense auprès de l’Ordre des médecins et de l’assurance maladie pour bloquer tous les parcours de transition hors de son contrôle. Elle fait par exemple pression ainsi pour que ces derniers ne soient pas remboursés par la sécu.
Nos corps, nos vies
Or, le code de la santé publique garantit le libre choix des médecins par leurs patientEs. Nos corps, nos vies : nous revendiquons un libre choix de nos parcours de soins. Nous exigeons une dépathologisation réelle de la transidentité : puisque cette dernière a été retirée du DSM-53 en 2010, on ne doit plus exiger que nous suivions un parcours psychiatrisant, qui retarde notre accès aux soins et aggrave nos conditions de vie et notre santé mentale.
Nous revendiquons donc ainsi un accès aux soins respectueux pour les personnes souhaitant effectuer une transition de genre sur le plan médical comme pour les consultations non liées à la transidentité, loin des maltraitances actuelles. Nous revendiquons le remboursement intégral par la sécurité sociale des frais liés à la transition, quel que soit le parcours de soins choisi.
Dans le même temps, si la loi de 2016 n’avait fait qu’entériner la situation précédente en permettant le changement de prénoms en mairie ; le changement de la mention de sexe à l’état civil lui se fait encore au bon vouloir d’un juge. Ce n’est pas acceptable. Ce n’est ni aux juges ni aux psys de juger de la validité de nos existences : changement d’état civil libre et gratuit maintenant !
Toujours plus susceptibles d’être agressséEs, assassinéEs, nous exigeons de vrais moyens contre les violences. Nous revendiquons un service public d’accueil et d’accompagnement des victimes, la mise en place d’une lutte contre les stéréotypes et les préjugés dès le plus jeune âge.
Sally Brina
- 1. Lire « Soutien à un médecin du ReST contre le Conseil national de l’Ordre des médecins », sur https://www.helloasso.com/associations/reseau %20sante %20trans/collectes/soutien-a-un-medecin-du-rest-contre-le-conseil-national-de-l-ordre-des-medecins
- 2. Cispasser : le passing désigne une expression de genre permettant clairement d’identifier une personne comme d’un genre ou l’autre. Cispasser signifie par exemple qu’une femme trans est instinctivement lue et identifiée comme femme au quotidien, à l’image d’une femme cis.
- 3. Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux.