Marseille, rue d’Aubagne, 5 novembre 2018. Trois immeubles mitoyens s’effondrent en pleine journée, sur celles ou ceux qui y résidaient ou qui passaient à ce moment dans la rue. Trois immeubles insalubres, vétustes, dangereux, connus des pouvoirs publics, de la mairie, depuis bien des années, mais qu’ils ont laissé aller jusqu’à l’effondrement en pleine rue.
Évidemment, au vu du scandale national qu’un tel événement constitue, les élus de la ville ont tout de suite tenté de faire diversion. Ils ont invoqué les fortes pluies de ces derniers jours, qui auraient fragilisé les bâtiements, ou bien la structure en copropriété de ces immeubles qui aurait empêché l’action publique de rénovation.
Julien Ruas, adjoint à la mairie de Marseille, a même réussi à affirmer, au pied des immeubles effondrés : « Notre objectif est de proposer un relogement à toutes les personnes qui en ont besoin ». Pas moins ! Il y a des morts, des blessés, des disparus, qui manifestement avaient besoin d’un logement décent et sûr, mais à l’évidence avant l’effondrement leur demande ne comptait pas !
Ils savent l’état de dégradation des quartiers anciens. 40 000 logements sont identifiés comme insalubres, sur la seule ville de Marseille, par l’inspecteur général de l’équipement. C’est le 3e immeuble qui s’effondre dans le 1er arrondissement en 5 ans, et un balcon s’est effondré cet été dans le 3e arrondissement, entraînant le décès d’une fillette. Un article de Marsactu daté de 2016 évoquait déjà le cas du 63 rue d’Aubagne, visé depuis 2008 par un arrêté de péril et qui attendait encore d’être réhabilité. Mais ils s’en moquent.
Ils invoquent le coût élevé des rénovations des immeubles anciens des quartiers populaires. C’est certes bien plus rentable de vendre aux affairistes et aux promoteurs, pour une gentrification à marche forcée, le centre-ville et le quartier du port, que de répondre à la demande de logement décent des habitantEs les plus défavorisés.
En cela Marseille n’est pas une exception. Les habitants de la Seine-Saint-Denis comme touTEs celles et ceux des quartiers populaires des grandes villes subissent la même politique de mépris du pouvoir : logement, école, justice et protection de l’enfance, santé, transport, services publics… On retrouve à chaque fois le même délabrement programmé. Mais gare à l’effondrement de trop, à celui qui va libérer la colère…
Jean-Marc Bourquin