Publié le Jeudi 19 mars 2015 à 21h32.

Départementales : le Front de gauche au fond de l’urne

Les élections départementales 2015 se déroulent dans un contexte de crise profonde. Selon les derniers sondages, l’abstention risque une nouvelle fois d’être le grand gagnant (elle avait atteint 56 % en 2011)... juste devant le FN et la droite. Pour le PS, la défaite risque d’être sanglante. Dans ce contexte, l’enjeu pour le Front de gauche est important : garder ses 237 sièges de conseillers généraux, dont une grande majorité étaient issus du PCF.

Comme aux dernières élections cantonales en 2011, les candidatEs du PCF dominent. Sur les 3 026 candidatures Front de gauche, 63 % sont communistes et seulement 7 % sont du Parti de gauche. Le reste des candidatures sont soit issues des autres composantes du FG, soit d’EÉLV ou de Nouvelle Donne dans le cadre d’alliances. Par rapport à 2011, on constate aussi un certain tassement de la couverture territoriale : à l’époque, le Front de gauche était présent dans 83 % des circonscriptions, 76 % aujourd’hui... dont près de 70 % pour le seul PCF.

Une stratégie communeContrairement aux dernières élections municipales, le Front de gauche pour ce scrutin part plutôt en ordre de bataille, avec une même stratégie d’alliance. Les divisions sont minimes puisque les alliances PCF-PS sont à la marge, ne concernant que 39 cantons, ainsi que quelques alliances avec des « frondeurs » comme c’est le cas dans l’Essonne.Ce qui prédomine pour ce scrutin, c’est l’alliance « Pour une alternative à gauche » regroupant le Front de gauche, EÉLV et Nouvelle Donne, espérant ainsi comme le dit Éric Coquerel du PG « que cette élection soit un peu moins difficile pour nous que pour les partis du gouvernement, auxquels on refuse d’être assimilés puisqu’ils font une politique de droite ».C’est avec EÉLV que les candidatures communes aux élections sont les plus nombreuses : 12,5 % des 1 517 binômes qui ont l’investiture du Front de gauche, cela sur 57 départements. Les écologistes, eux, seront présents dans un peu moins de 1 000 cantons, mais dans une certaine cacophonie politique. En effet, dans 45 % des cas, EÉLV se présente avec au moins une composante du Front de gauche, 36 % en autonomie complète, 16 % en alliance avec le PS et, dans le reste des cas, à la fois avec le PS et le PCF. Cela ne facilite pas un message politique cohérent, en tout cas pas celui d’une véritable opposition au gouvernement.

Nouvelle union de la gauche ?Selon le Front de gauche, trois raisons fondamentales charpentent ces candidatures de rassemblement : « Éviter la surenchère libérale en empêchant la droite et l’extrême droite de faire main basse sur des dizaines de départements », « présenter des élus de proximité qui défendent le département et ses services publics pour amplifier les politiques de solidarité et d’égalité », « s’unir contre l’austérité qui frappe les collectivités, les services publics, mais aussi les associations ». Mais au-delà, beaucoup au sein du Front de gauche y voient une étape supplémentaire vers une nouvelle union de la gauche.Pour Clémentine Autain d’Ensemble, « il s’agit de résister le plus possible aux méfaits des politiques de droite comme dites de gauche, et de préparer le terrain pour la reconstruction à gauche d’une force de transformation sociale et écologique ». Même si il se montre plus prudent, indiquant que ce « rassemblement est d’abord à usage immédiat pour ces élections », Pierre Laurent considère tout de même que « cette gauche nouvelle qui émerge devra ensuite poursuivre et amplifier ce rassemblement au lendemain des départementales »... soutenu en cela par Cécile Duflot qui pense que l’on serait « à l’aube d’une recomposition politique majeure », malgré les divergences au sein même de son parti...Les grandes manœuvres ont donc commencé mais sur quelle base et avec qui ? La direction d’EÉLV est divisée, voire au bord de l’explosion. Certains veulent rester dans la majorité et même retourner au gouvernement, à l’issue d’un remaniement post-électoral, qui sait... Quant aux « frondeurs », on le voit à chaque épreuve de vérité, leur opposition au gouvernement PS-Medef n’est que de façade : en aucun cas, ils ne souhaitent rompre avec la politique libérale à laquelle, au-delà du gouvernement, leur parti s’est converti.Les décantations ne sont pas encore allées jusqu’au bout, mais l’objectif semble bien dans les mois qui viennent d’aller vers une recomposition politique sans rupture programmatique et stratégique profonde avec la vieille gauche. Qui viendra les bousculer ?

Sandra Demarcq