Dimanche dernier, le premier tour des élections régionales est apparu comme le reflet, certes déformé, de la situation sociale et politique du pays. Une abstention historique nourrie par les colères sociales de ces dernières années, une claque magistrale administrée à tous les représentants de la macronie, une extrême droite contenue dans les urnes mais toujours dangereuse, et une alternative qui reste à construire pour rompre avec ce vieux monde…
À peine unE électeurE sur trois est allé voter (contre unE électeurE sur deux lors des régionales précédentes...). Cette abstention atteint même 87% dans la catégorie des 18-24 ans ! Une abstention massive qui touche largement les milieux populaires et qui ne s’explique pas seulement par le soleil, l’attrait des parcs ou des terrasses… Car c’est peu dire que l’enjeu de ces élections est apparu comme décalé par rapport à la réalité de nos vies. En opposition à l’offensive tous azimuts de ce pouvoir — antisocial, autoritaire, raciste... — tout dévoué aux capitalistes, aux prises depuis un an et demi avec une crise sanitaire certes sans précédent mais face à laquelle ce gouvernement est apparu largement incompétent, la population n’a donc pas vu dans ces élections le moyen d’exprimer ses revendications et ses besoins. On peut la comprendre.
Car c’est la crise politique qui travaille depuis longtemps le système de ceux d’en haut qui a éclaté à travers cette abstention historique, illustrant leur illégitimité à diriger la société. Aussi, il y avait vraiment de quoi avoir envie de péter sa télévision dimanche soir en entendant tous ces politiciens professionnels y aller de leur couplet de morale civique et citoyenne, faisant mine de ne pas comprendre que c’est bien eux et leur système qui sont d’abord sanctionnés, et que c’est leur campagne sondagière, totalement hors sol sur le terrain de l’insécurité, qui est avant tout rejetée.
Macron giflé, le danger réactionnaire toujours là !
Dans un tel contexte, on peut se réjouir que les grands perdants de cette soirée électorale soient les dignes représentants du macronisme, à commencer par ceux qui en assument les responsabilités directes. Symbole de cette déroute (qui les conduit en moyenne à 11% des suffrages exprimés, soit moins de 4% des inscritEs), l’ancien responsable de la réforme de retraites contre laquelle nous nous sommes battus à l’hiver 2019-2020, Laurent Pietraszewski, n’accède même pas au second tour dans les Hauts-de-France, cela malgré le soutien appuyé de deux barons, Dupond-Moretti et Darmanin… Plus qu’un appui, ce petit monde constitue à l’évidence un repoussoir pour toutes celles et ceux qui subissent les effets de leur politique au quotidien.
Malgré la petite musique médiatique et sondagière de ces dernières semaines, la rouste prise par Macron et ses représentants n’a — fort heureusement — pas ouvert la voie au danger de la prise de contrôle de plusieurs régions par le Rassemblement national. En tête dans six régions il y a six ans, il ne l’est que dans une seule (en PACA), passant de 28% à 19% à l’échelle nationale. Mais c’est déjà trop, et la menace demeure, qui appelle vigilance et mobilisations, notamment le 3 juillet lors du congrès du RN à Perpignan (voir page 12).
L’arbre un peu vacillant mais toujours présent du RN ne doit pas cacher la forêt réactionnaire de la droite dite « classique », qui lui dispute le plus souvent ses thèmes traditionnel de campagne (la sécurité, l’immigration, bref le racisme...). Cette droite LR va sans nul doute conserver ces prochains jours tous ses postes et ses régions, aiguisant de Bertrand à Pécresse les appétits pour 2022. Droite, droite extrême ou extrême droite… bien malin qui peut en toute clarté en saisir toutes les nuances.
Dans la rue et les urnes, pour une alternative anticapitaliste
A gauche, il fallait être attentif pour saisir la multitude des configurations. Totalement unie en particulier dans les Hauts-de-France et en PACA (moins la FI), tout le panel des combinaisons possibles de la gauche institutionnelle était représenté dans ces élections. L’abstention massive a entraîné une prime aux sortants, y compris PS (comme en Occitanie, en Nouvelle Aquitaine, en Bretagne ou en Bourgogne), avec toutefois un PS qui reste affaibli et contesté par la percée d’EÉLV. Mais de façon globale, y compris quand les listes étaient marquées par une certaine radicalité (à l’image de celles à l’initiative des Insoumis et de nos camarades du NPA en Nouvelle-Aquitaine et en Occitanie), les résultats restent faibles. Pour sa part, Lutte ouvrière, qui présentait des listes partout, engrange des résultats toujours modestes mais qui résistent et parfois augmentent, notamment dans les régions où le reste de la gauche était uni dès le premier tour.
Les élections ne sont pas le terrain de prédilection du monde du travail, et ce dimanche en a encore été l’illustration. Pour défendre nos intérêts, pour nous représenter nous-mêmes, tout reste à faire. À commencer par construire les mobilisations pour mettre fin aux licenciements et aux suppressions de postes, pour défendre nos droits face aux attaques liberticides, pour résister à l’offensive raciste et islamophobe, pour combattre le prétendu « capitalisme vert » et exiger la justice climatique, pour porter une véritable égalité des droits…
Mettre à poubelle l’idéologie et le programme commun des classes dirigeantes et des partis à leur service contre notre camp social, exprimer nos intérêts et nous organiser... Des grèves et manifestations jusqu’aux urnes, c’est la voie — anticapitaliste et révolutionnaire — que le NPA souhaite tracer ces prochains mois, modestement mais fermement.