Publié le Vendredi 17 janvier 2025 à 09h00.

En Afrique, Macron fait du Macron

«Puisque ces évènements me dépassent feignons d’en être l’organisateur ». Cette devise légèrement remaniée de Cocteau, Macron l’a fait sienne lors de son discours à la conférence annuelle des ambassadrices et ambassadeurs de France. Un discours par ailleurs aux accents fort peu diplomatiques vis-à-vis de l’Afrique sahélienne.

Dire merci

En abordant le continent lors de sa présentation, Macron a persisté à défendre le bien-fondé de l’opération Barkhane. Une intervention présentée comme une nécessité dans la lutte contre le terrorisme en dépit d’un résultat pour le moins peu flatteur au vu de la situation largement dégradée lors de la fin de cette mission. Puis, revanchard, il soutient que sans l’appui militaire de la France, les gouvernements des États du Sahel ne seraient pas là et, continuant dans cette même veine, il fustige l’ingratitude des dirigeants africains qui ont oublié de dire « merci ». Il faut dire que la France est en droit de donner des leçons sur les remerciements. Elle qui a remercié fort singulièrement en massacrant à Thiaroye les tirailleurs sénégalais qui avaient participé à la libération de la France contre le nazisme.

Falsification

Mais au-delà du mépris vis-à-vis des peuples des pays dominés et des pauvres en France qui reste la marque de fabrique de Macron, ce dernier n’a pas hésité à asséner des contre-­vérités en prétendant que c’était le choix de Paris de quitter militairement les pays sahéliens pour ne pas, dit-il, être des supplétifs des putschistes. Rien n’est plus faux. Il suffit de se rappeler la décision des autorités françaises de rester au Niger malgré l’opposition des autorités de ce pays. Ce bras de fer entre Paris et Niamey avait aussi déclenché des mobilisations populaires bloquant les entrées et sorties des emprises militaires françaises du Niger. Macron avait dû reculer et organiser l’exfiltration des soldats français.

Mensonge tout aussi éhonté lorsqu’il prétend que le départ des troupes françaises est le fruit d’une négociation et que par courtoisie il a laissé la primeur de l’annonce aux gouvernements africains. Tchadiens et Sénégalais ont réfuté cette fable, insistant dans leur communiqué qu’il s’agissait bien d’une décision souveraine de leur pays.

Affaiblissement

Au-delà de l’arrogance du personnage, cette situation met à mal une option que la hiérarchie militaire française pourrait utiliser. Celle d’une négociation pour maintenir une présence sur la base de la ville sénégalaise de Rufisque qui revêt une grande importance pour la dissuasion nucléaire française. En effet, cette implantation permet notamment les communications avec les sous-marins nucléaires de la marine nationale.

On peut dire que les déclarations intempestives de Macron ne font que renforcer la marginalisation de l’impérialisme français en Afrique. Certains le déplorent, nous on s’en réjouit.

Paul Martial