Publié le Jeudi 15 septembre 2022 à 08h00.

Face au rouleau compresseur néolibéral-autoritaire, la riposte sociale et politique est à construire

« La réforme de l’assurance chômage sera-t-elle l’étincelle de la rentrée sociale ? » Ainsi s’interrogeait, le 13 septembre, un éditorialiste de 20 Minutes, sans évidemment être capable de répondre à la question, tant il est malaisé de faire des pronostics sur les « rentrées sociales » et sur ce qui, dans un contexte potentiellement explosif, pourrait mettre le feu aux poudres. Une chose est toutefois certaine : la rentrée se déroule dans un climat social tendu, et des explosions sont possibles — et souhaitables.

Avec une inflation qui mine la vie quotidienne des classes populaires, des salaires qui n’augmentent pas, des services publics sous tension — notamment dans la santé et l’éducation, et un pouvoir toujours aussi arrogant qui, tout en faisant mine de se préoccuper de la situation, continue ses politiques pour les plus riches et entend dérouler son programme de poursuite de la casse sociale, la rentrée avance dans un contexte tendu.

Ils osent tout, c’est même à ça qu’on les reconnait

Dès lors, l’annonce d’une nouvelle contre-réforme de l’assurance chômage qui mettra encore un peu plus de pression sur les chômeurEs et sur l’ensemble des salariéEs (voir notre dossier) résonne comme une provocation. Alors que des millions, voire des dizaines de millions, galèrent pour vivre une vie à peine décente, on nous explique que le problème serait les difficultés que les patrons ont à recruter, et que ce problème viendrait des chômeurEs eux-mêmes et elles-mêmes.

La Macronie et ses alliés osent tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît ! Et le moins que l’on puisse dire est que la gifle reçue aux législatives, avec une absence de majorité absolue à l’Assemblée, si elle les a amenés, après de premiers revers, à reculer la rentrée parlementaire, n’a pas conduit Macron et les siens à se placer dans une logique de compromis, ou même de dialogue. Le rouleau compresseur néolibéral-autoritaire est bien là, avec ses projets de destruction des retraites et de liquidation de ce qui reste de l’assurance chômage, comptant bien pouvoir s’appuyer sur la droite — et parfois l’extrême droite — pour faire passer ses réformes antisociales.

L’épreuve de force

Alors que les signaux se multiplient (grèves localisées pour les salaires, mobilisations autour de certains établissements scolaires, colère populaire palpable face à la vie chère et au mépris), le gouvernement a de toute évidence choisi l’épreuve de force. Et ce n’est pas l’activité parlementaire des députéEs les plus radicaux de la Nupes, quand bien même elle pourrait contribuer à démasquer les mensonges du pouvoir et à rendre visibles les colères, qui fera reculer la Macronie. Cette dernière ne comprend que le rapport de forces, et c’est bien de cela dont il s’agit aujourd’hui de discuter dans la gauche sociale et politique : comment créer les conditions d’une mobilisation de masse, unitaire et radicale, pour stopper la machine ? Comment construire les grèves, manifestations, occupations… qui seront nécessaires pour faire reculer Macron ?

De premières initiatives ont été prises, qui permettent d’avoir des objectifs : journée de mobilisation dans la santé le 22 septembre, journée de grève interprofessionnelle le 29 septembre, une marche contre la vie chère à la mi-octobre. Deux échéances qui ont leurs limites, et qui ne permettent pas, à ce stade, de dépasser les divisions qui peuvent exister au sein de la gauche sociale et politique, mais dont il s’agit de se saisir : en les construisant sur nos lieux de travail, nos lieux d’études, nos lieux de vie ; en initiant des cadres de mobilisation locaux ou en se saisissant de cadres existants, qu’il s’agisse de collectifs interpros ou de parlements/comités locaux de la Nupes ; en rappelant que seule la mobilisation du plus grand nombre pourra payer si l’on veut vraiment faire reculer le gouvernement.

Construire la riposte

La grève du 29 septembre et la marche contre la vie chère ne constituent pas à elles seules une réponse à la hauteur, mais pourraient jouer un rôle de regroupement, voire de catalyseur. Il faut donc s’en emparer, les préparer et, tout en cherchant à les construire dans l’unité la plus large possible, en profiter pour discuter politique et revendications. Plutôt que d’un référendum sur les « superprofits », qui donne l’illusion d’une solution institutionnelle au problème de la répartition des richesses et semble épargner les grandes entreprises faisant des profits pas « supers », ne s’agit-il pas d’exiger une augmentation générale des salaires et de tous les revenus, et leur indexation sur les prix ? Plutôt que de vouloir demander aux plus riches de rendre un peu de ce qu’ils ont volé, ne s’agit-il pas de poser la question de la réappropriation publique de secteurs entiers et vitaux de l’économie, qui n’ont rien à faire dans les mains du privé ? Et plutôt que d’opposer « gauche du travail » et « gauche des allocs », ne s’agit-il pas de mettre au cœur des discussions, la nécessité d’une gauche de rupture, d’une gauche de combat, refusant toute forme d’accompagnement/gestion du néolibéralisme, et aussi fidèle aux intérêts des salariéEs et de la jeunesse que Macron l’est à ceux du patronat ? C’est ce à quoi nous nous emploierons dans les jours et les semaines à venir, avec la grève du 29 septembre et la marche contre la vie chère en ligne de mire, comme des étapes dans la construction d’une riposte sociale globale et, alors que la menace de l’extrême droite est bien là, de perspectives politiques à la hauteur des enjeux.