Le soir de sa victoire à la primaire organisée par La belle alliance populaire (dont le nom prend aujourd’hui toute sa saveur), Hamon s’était donné deux objectifs : rassembler « sa famille » et rassembler « la gauche ». À cette étape, on ne peut pas dire que ces deux objectifs soient totalement atteints.
Depuis sa victoire, Hamon s’est en effet attelé à essayer de rassembler « la gauche » pour former une nouvelle « majorité gouvernementale ». Il y est en partie parvenu le 26 février dernier, en s’alliant avec Europe écologie-les Verts. C’est donc sans surprise que ces derniers sont entrés dans son équipe de campagne et que Jadot, le candidat qui s’est désisté, est devenu conseiller spécial. Mais il n’est pas le seul à faire son entrée dans l’organigramme : Éva Joly (l’ancienne candidate de 2012) est notamment en charge de la lutte contre l’évasion fiscale et José Bové de « la mondialisation agricole », aux côtés d’autres éluEs d’EÉLV.
L’accord programmatique entre Hamon et EÉLV prévoit entre autres la sortie programmée du nucléaire, l’arrêt du projet de Notre-Dame-des-Landes, ainsi que la fin de l’état d’urgence. Côté électoral, le cœur de l’affaire, pour les prochaines législatives, EÉLV s’en sort pas mal du tout : 43 circonscriptions réservées aux écologistes (dont la dizaine déjà détenue par les députés EÉLV sortants), dont celle de Duflot, grande instigatrice de l’accord, qui malgré le désaccord de Hidalgo et du PS parisien, obtient son investiture. Cerise sur le gâteau, EÉLV pourra donc présenter dans plus de 500 circonscriptions des candidatEs contre le PS !
Les « preuves d’amour »... ou l’épreuve d’amour ?
En revanche, l’entrée dans l’équipe de campagne des anciens ou actuels membres du gouvernement, partisans assumés de la ligne Hollande-Valls, se fait au compte-gouttes. Et ces derniers jours, ceux-ci sont à l’offensive, menaçant ouvertement pour celles et ceux qui n’ont pas encore franchi le pas de soutenir Macron. À à peine cinquante jours du premier tour des élections, Hamon est donc loin de faire l’unanimité auprès de la majorité gouvernementale, son propre parti, qui lui reproche, entre autres, son alliance avec les Verts.
C’est le cas de Kanner, le ministre de la Ville, un proche de Valls qui indique dans le JDD que « Remettre en cause le Lyon-Turin ou Notre-Dame-des-Landes, ce n’est pas une bonne idée. Intégrer dans l’accord la fin de l’état d’urgence, soumettre la sécurité des Français à un deal électoral, c’est une ineptie. Alors qu’ils bénéficieront de 43 circonscriptions réservées, il est anormal que les Verts soient autorisés à se présenter partout, y compris contre Myriam El Khomri : le soutien de Cécile Duflot à Caroline De Haas dans la sixième circonscription de Paris est une pure provocation ». Et d’affirmer « un appel à Benoît pour qu’il rassemble sa famille. On a besoin de preuves d’amour ».
Pourtant, Hamon ne cesse d’en adresser, des « preuves d’amour », défendant même le bilan du quinquennat : celui en matière de santé, le « compte pénibilité », le « compte personnel d’activité », les « postes de policier » créés depuis 5 ans... Et pas d’inquiétude, il ne veut pas plus « renégocier la dette de la France », mais seulement « mutualiser » les dettes européennes…
On est donc loin, très loin, du « discours extrêmement radical » que l’impayable Le Guen prête à Hamon et qui l’empêcherait de lui accorder son parrainage. Mais derrière tout cela, un autre match se joue en coulisse, celui pour le leadership et l’orientation du PS. Et pour le gagner, certains sont sans aucun doute prêts à tout faire pour faire échouer « leur » candidat officiel...
Sandra Demarcq