La fin de campagne de Hollande ne surprend pas. Le candidat PS se garde bien de faire la moindre promesse pour son possible quinquennat.Au moment où Sarkozy dérive et délire à l’extrême droite, Hollande se dit « confiant » et « cohérent ». Autrement dit, il se prépare tranquillement à gagner au centre et gouverner à droite.
Encore un procès d’intention envers « le candidat de toute la gauche », comme il se présente lui-même ? Lisons plutôt ce qu’il dit dans le Parisien du samedi 29 avril. C’est à l’image de toute sa campagne.Finance Sur d’éventuelles réactions de la finance à son élection : « Il faudra simplement être clair, comme je le suis, vigilant, sérieux sur nos engagements. Pour être transparent, j’ai annoncé que je demanderai à la Cour des comptes un audit des finances publiques réelles et déterminerai si des corrections sont nécessaires. » Chirac avait fait cela en 1995 pour expliquer que la « fracture sociale » devrait attendre pour être réduite… Hollande insiste : « Je veux connaître la situation dont nous hériterons pour que les Français soient éclairés. Les derniers mois de campagne coûtent généralement cher aux comptes publics compte tenu des promesses qui aboutissent parfois à des distributions dispendieuses. » Après nous avoir promis de ne rien nous promettre, il dit maintenant qu’il effacera dès le 7 mai les promesses qu’il ne fait pas !
Sur « la règle d’or budgétaire inscrite dans la Constitution » : « Je n’y suis pas favorable. Une telle règle ne doit pas figurer dans la Constitution, mais dans une loi organique qui pourrait être votée dès juillet. » Sur le Smic : « Un coup de pouce est nécessaire, il est attendu. » Mais : « Son ampleur doit être limitée compte tenu de la situation économique, notamment celle de beaucoup de petites entreprises. »
À la question : « Pour créer 60 000 postes dans l’Éducation nationale, où baisserez-vous les effectifs ? » Il répond : « Il y aura effectivement une stabilité globale des effectifs de la fonction publique. La règle aveugle du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux sera terminée. » Et à la question : « Dans quels ministères les effectifs baisseront-ils ? » : « Nous avons trois priorités : l’éducation, la justice, la police et la gendarmerie. Les autres ne sont pas prioritaires. » Comme le disait le socialiste Hamon pendant les primaires, les créations de postes de profs et de policiers seraient bien financées par des suppressions de postes d’infirmières. Cas par casQue les électeurs de Bayrou se rassurent donc : Hollande n’est pas plus à gauche que le Monsieur Plus de la rigueur budgétaire ! Mais que les électeurs du FN se rassurent aussi : sur la sécurité et l’immigration, il est désormais presque plus à droite que le Béarnais !
« Aujourd’hui il existe déjà des régularisations au cas par cas : 30 000 par an. Je ne dis pas pour autant que ce sont des régularisations massives ! Prétendre que le cas par cas appliqué partout selon les mêmes critères dans toutes les préfectures serait un changement de nature, c’est faux. Ce changement apportera plus de transparence, plus de justice mais n’entraînera pas plus de régularisations qu’aujourd’hui. Ce sera le même ordre de grandeur. Simplement les critères seront appliqués partout de la même manière. Ces critères seront : la durée de séjour qui ne sera pas abaissée, la situation de famille, le travail. »
Même ordre de grandeur ? Hollande refuse ici de donner un nouveau coup de hache dans le droit d’asile ou le regroupement familial, au contraire de Sarkozy. Mais il ressert en même temps la cuvée Sarkozy… 2007 de « l’immigration choisie ». Sur RTL : « en période de crise la limitation de l’immigration économique est nécessaire ». Il propose que le Parlement fixe chaque année des quotas d’immigration de travail, et précise qu’on devrait sans doute passer de 30 000 (aujourd’hui) à 20 000 visas de ce type. AustéritéReconnaissons-lui une vertu : il est encore plus clair que ses prédécesseurs impétrants socialistes à la présidence. Il mènera une politique d’austérité, fera payer la crise aux classes populaires, maintiendra la chasse à l’immigré, ne fera rien contre les licenciements et les bas salaires. Le 6 mai, chassons Sarkozy. Mais de toute façon, le 7 mai, le combat continue.
Yann Cezard