Un an jour pour jour après le fameux « J’aime l’entreprise » de Manuel Valls à l’université du Medef, Emmanuel Macron a rappelé cet été son « amour » au patronat en critiquant la politique de la gauche envers les entreprises et en attaquant une nouvelle fois les 35 heures.
En effet, pour le ministre de l’Économie, « La gauche a pu croire à un moment, il y a longtemps, que la politique se faisait contre les entreprises, ou au moins sans elles. (...) Que la France pourrait aller mieux, en travaillant moins. C’était des fausses idées ». Une petite phrase très applaudie à l’université du Medef... et qui n’est pas passée inaperçue auprès de certains socialistes, et même auprès de Valls qui a dû « recadrer » son ministre banquier : « Les Français n’ont rien à faire avec les polémiques qui tirent vers le passé. Il n’y aura pas de remise en cause du temps de travail et des 35 heures. (...) Les vrais sujets sont l’emploi et la croissance. Les petites phrases font mal à la vie publique ».
« Le plus beau combat de la gauche » !
Après ce pseudo recadrage, Macron a du rétropédaler, indiquant qu’« il ne parlait pas des 35 heures mais du rapport au travail. Il en faut plus, pas moins. C’est le plus beau combat de la gauche, car le travail, c’est le moteur de l’émancipation individuelle »...
Mais derrière cette prétendue polémique, Macron et Valls continuent main dans la main une même orientation au service du patronat. Les fameuses « preuves d’amour » si chères au Medef seront amplifiées ces prochains mois au vu du programme de rentrée dévoilé par Valls dans une interview au journal les Échos et lors de son discours à l’université d'été du PS à La Rochelle il y a quelques jours.
Sur le fond, le programme est simple : continuer à détruire les protections des salariéEs, à commencer par le code du travail, et poursuivre le transfert des richesses des fonds publics vers les caisses privées en amplifiant les cadeaux fiscaux au patronat, tout cela pour soi-disant relancer la croissance. Bref, contrairement à ce que Valls avait laissé entendre en signant le texte majoritaire au congrès du PS, ils garderont bien – sans surprise – le cap de leur politique économique. Mais il est vrai que les promesses n’engagent que celles et ceux qui y croient...
Tristes centristes...
Au-delà de la continuité de la politique économique et antisociale de ce gouvernement, l’université d’été du PS dans son ensemble, et le discours de Valls en particulier, montrent une nouvelle étape dans l’évolution de ce parti vers le centrisme. Désormais, la rupture stratégique avec le PS historique est totalement assumée, et Valls trace de plus en plus clairement les contours d’un « rassemblement des progressistes ». Selon lui, il faut « bousculer certains de nos tabous, penser l’avenir pour le façonner, sortir du nombrilisme pour s’adresser à tous sans exclusive », les socialistes devant « évoluer » pour bâtir un « nouveau cycle d’Epinay ». De la part de Valls qui continue à creuser son sillon, ce discours n’est pas vraiment nouveau... mais ce qui l’est davantage, c’est que ce discours remporte de plus en plus l’adhésion des militantEs socialistes.
Certes, en interne, les « Frondeurs » sont toujours aussi critiques, voir virulents, menaçants même… en tous cas dans leurs propos. On a pu le constater une nouvelle fois à leurs journées d’été, où Marie-Noëlle Lienemann considère Valls comme « un problème pour la France, un problème pour la gauche ». D’autres, face à la nouvelle attaque programmée contre le code du travail, menacent de ne pas voter certains textes, comme Pascal Cherki qui s’insurge et indique que « Leur truc sur le marché du travail, ce sera un vrai chiffon rouge à l’Assemblée »... Mais comme pour toutes les autres réformes, une large partie d’entre eux finira bien soit par voter pour, soit par s’abstenir... Rien de nouveau, même sous le soleil estival.
On le voit, les masques n’en finissent plus de tomber : la crise du PS s’accentue sur fond d’adaptation idéologique de plus en plus poussée. En cette rentrée, nous devons plus que jamais développer les résistances, et ouvrir le débat sur quelle serait une véritable alternative politique, indépendante du PS et de ses satellites et en rupture avec ce système.
Sandra Demarcq