Le 19 décembre dernier, le Conseil d’orientation des retraites (le COR, cet organisme d’« experts » et « partenaires sociaux » installé par Chirac en 2000, pour produire un prétendu « diagnostic partagé ») a publié un nouveau rapport sur les perspectives de financement des retraites. Il vise à préparer de nouvelles régressions sociales.Sur la base d’hypothèses économiques jugées « optimistes » (un taux de croissance du PIB de 2 % par an à partir de 2014 et une décrue du chômage), le COR estime que le déficit de l’ensemble des systèmes de retraites (général, fonctionnaires, non salariés, régimes spéciaux) passerait de 14 milliards d’euros en 2011 (0,7 % du PIB) à 18,8 milliards en 2017 (0,9 % du PIB), puis de 20 à 25 milliards d’euros en 2020 selon les différents scénarios envisagés.Sans surprise, le COR propose d’élever le taux de cotisation de 1,1 point, ou de baisser de 5 % le montant des pensions, ou de retarder encore de 9 mois l’âge de départ à la retraite. Ou un cocktail de ces trois options.La démographie a bon dosComme d’habitude, le diagnostic censé justifier ces nouvelles régressions met en avant un seul élément : la démographie. Le déficit aurait pour source essentielle le nombre croissant de retraitéEs par rapport aux actifs, les effets retardés du « baby boom », l’élévation de la durée moyenne de vie. Même si ce déficit est bien sûr aggravé par la crise et la montée du chômage.Ce que le COR et toute la classe politique autoproclamée « responsable », PS et UMP en tête, se gardent bien de rappeler, c’est que la productivité des actifs a au moins doublé depuis trente ans. De quoi largement compenser cette évolution démographique. Mais ces gains ont été entièrement confisqués par les entreprises, leurs propriétaires, les rentiers. L’installation durable du chômage de masse, la généralisation de la précarité, la baisse de dix points de la part des salaires dans la valeur ajoutée des entreprises entre 1982 et aujourd’hui, ont asséché les caisses de retraites.Les calculs du COR peuvent d’ailleurs donner une petite idée des conséquences du chômage sur ce déficit : en 2020, le « trou » serait de 20,1 milliards d’euros avec un taux de chômage de 7,3 %, contre 24,9 milliards avec un taux de 7,8 %. 0,5 % de chômage en plus ou en moins, 5 milliards de différence !Que nous préparent les socialistes ?Officiellement le gouvernement attend un nouveau rapport du COR sur l’état des différents régimes, pour le 22 janvier. Il devrait ensuite désigner une « commission pour l’avenir des retraites » qui proposerait « différentes pistes de réforme ». Le gouvernement, courageusement caché derrière de soi-disant experts impartiaux, engagerait alors une nouvelle réforme des retraites, avant la fin de l’année 2013.Une réforme « de gauche » bien sûr : le ministre de l’économie Moscovici a déjà promis des évolutions « justes » intégrant « la pénibilité et les carrières interrompues ». Il annonce ainsi les nouveaux sacrifices (sur l’autel du profit) en annonçant les leurres et carottes devant accompagner un nouveau recul du départ à la retraite. Tout cela au nom de la nécessité de « sauver les retraites » ! Parions même que Hollande s’appuiera sur la baisse déjà effective des pensions. Cette année, déjà, les complémentaires de 11 millions de salariés du privé vont baisser, car elles seront revalorisées en deçà de l’inflation…Yann Cézard