Publié le Mercredi 3 octobre 2012 à 16h41.

Réussir la convergence des luttes

Sale temps pour le gouvernement. Cela fait à peine quatre mois qu’il est en place… mais il est déjà taclé à gauche et dans la rue. Un indice de la crise sociale et politique qui s’accélère.Samedi 29 septembre, c’était les Ford et PSA au Mondial de l’automobile, puis à l’occasion d’un meeting à Aulnay. Dimanche 30, des dizaines de milliers de manifestants sont venus de toute la France pour dire leur refus de l’austérité, et rappeler pour certains qu’ils n’avaient pas voté Hollande pour ça. Loin d’être abattu, le « peuple de gauche » avait décidément un petit air frondeur ce week-end sous le soleil.Au cœur de la crise, il y a la responsabilité de l’État, ou celle qu’il n’a pas envie d’assumer : l’État arrogant qui assène ses plans de rigueur sur l’air de la fatalité pour les plus pauvres ; mais l’État impuissant dès il s’agit de faire face aux riches qui ferment les usines et sèment la misère… Symbole d’un gouvernement dont la popularité est en chute libre, Arnaud Montebourg le « ministre improductif » d’un redressement plus qu’incertain aura donc essuyé les quolibets à Florange, avant d’être invisible au Mondial de l’auto.Ayrault a eu beau répéter, jeudi 27 sur France 2, qu’il avait la situation bien en main, elle semble pour partie lui échapper. Sans que l’état des luttes et des résistances ne soit pour l’instant en mesure de lui adresser autre chose qu’un carton rouge plutôt symbolique.

Sale temps pour les travailleursCar l’autre versant de la situation, c’est aussi l’accélération d’une crise que subissent de plein fouet les travailleurs.L’austérité s’aggrave partout en Europe, sur fond de récession. En Espagne, le gouvernement Rajoy a annoncé la semaine dernière une réduction des déficits de près de 40 milliards d’euros, afin de passer de 11 % du PIB en 2011 à 4,5 % en 2013. En Grèce, c’est un nouveau tour de vis de 11,5 milliards dans un pays déjà exsangue. En France, il faudrait trouver 30 milliards, ou plutôt 50 car la croissance annoncée a déjà un air de fiction, si l’objectif reste bien celui des 3 % du PIB pour 2013. Un chiffre de fou furieux paraît-il, impossible et inutile…Sauf que ce ne sont pas les politiciens, ni les commentateurs, ni les experts qui décident mais… les « marchés » qui ont trouvé la bonne combine pour mettre les États sous pression et ramasser le pactole sous forme de taux d’intérêts élevés. Le budget sera donc une catastrophe, celui de l’État comme celui de la Sécurité sociale.« Si quelqu’un commence à restructurer, cela obligera tout le monde à suivre » avait expliqué Carlos Ghosn, le PDG de Renault Nissan au mois de mars. C’est maintenant chose faite. Après PSA, c’est au tour de Renault d’engager avec les « partenaires sociaux » une prétendue  « concertation » en octobre pour imposer sur le modèle de Sevelnord de nouveaux « accords de compétitivité ». Et sans attendre, les deux compères se sont entendus comme larrons en foire pour exiger en urgence une nouvelle baisse des cotisations sociales pour baisser le coût du travail. L’État plutôt prévenant a d’ailleurs délégué Louis Gallois, l’ex-PDG d’EADS, pour plancher sur le sujet fin octobre. Il promet un « choc de compétitivité », entendez une attaque en règle contre la part socialisée du salaire, et toutes ces « charges » décidément insupportables.On aura donc les deux, l’attaque contre les salaires et contre l’emploi (l’une n’empêchant pas l’autre) comme à Goodyear ou pour les Conti : d’abord les sacrifices, ensuite la lourde. Dans tous les secteurs, avec chaque semaine de nouveaux venus. « Alerte sur les centres d’appels » titrait le Journal du dimanche le weekend dernier : « La profession craint jusqu’à 7 000 suppressions d’emplois d’ici un an ». C’est manifestement loin d’être terminé.

Commencer à reconstruire le rapport de forcesL’hirondelle de ce week-end ne suffira donc pas à faire le printemps : pas facile de surmonter l’attentisme, mais aussi les préventions et les sectarismes lorsqu’il s’agit de réunir des ouvriers de Ford et de PSA. Et même si la question du référendum a finalement été peu reprise par les manifestants dimanche, on voit bien que l’opération a eu aussi une dimension politicienne : une démonstration de force militante pour le PCF alors que les caméras étaient pour Jean-Luc Mélenchon, sans que ni l’un ni l’autre n’ait envie de donner des perspectives pour les luttes, même si les manifestants en sont sortis ragaillardis.C’est donc le sens de notre intervention politique en tant que NPA, à notre échelle forcément modeste, de faire le lien entre toutes les attaques, et de contribuer à faire le lien entre les équipes militantes. Cela commence dès le 6 octobre pour la santé, puis le 9 octobre pour l’emploi, afin de construire des convergences et y travailler sans relâche, dans la durée, dans le cadre d’une campagne de tout le parti contre la politique du patronat et du gouvernement. Et pourquoi pas, comme l’ont déjà défendu Philippe Poutou et Olivier Besancenot, mettre en discussion l’objectif d’une grande manifestation nationale pour en finir avec les suppressions d’emplois.Jean-François Cabral