Dans la série « l’UMP, son univers impitoyable », l’entrée en scène de Sarkozy allait, nous disait-on, tout changer. Sarkozy a tapé du point sur la table, organisé quelques bouffes, passé quelques coups de fil, donné un ultimatum : rien n’y fait, la guerre des clans se poursuit de plus belle.Son idée géniale du référendum, voter pour savoir s’il fallait voter, a pris l’eau. Copé, après avoir laissé croire qu’il dirait oui a dit non pour au final se dire d’accord avec un nouveau vote… en 2014 ! Et un référendum pour 2013 sur les statuts. Tout en précisant que le président de l’UMP qui serait élu en 2014 ne pourrait prétendre être candidat en 2017 !Une provocation pour Fillon qui refuse de dissoudre son groupe dissident à l’Assemblée nationale, le Rassemblement-UMP, et s’apprête à aller devant la justice pour faire annuler l’élection.Le bal des ambitions personnellesLes deux protagonistes se sont revus deux fois lundi sans que rien ne bouge. L’ultimatum de Sarkozy est resté sans effet. Les haines recuites dans les serres chaudes du pouvoir, savamment attisées par l’ancien patron de la maison, alimentent le feuilleton médiatique. Et les revirements commencent à s’opérer. Luc Chatel, vice-président de l’UMP, proche de Copé, est monté au créneau pour demander un nouveau vote, tout en essayant de se mettre dans les pas de Sarkozy. Les députés qui se disent « non-alignés », dont Bruno Le Maire et Nathalie Kosciusko-Morizet, ont repris la même chanson et envisagent de constituer leur propre groupe parlementaire. De vieux invités au bal des ambitions !Copé s’accroche au poste, pariant sur la lassitude, la force de l’appareil et l’approche des municipales pour s’imposer. Et Fillon reste droit dans ses bottes pour obliger chacun à se positionner. Derrière les faux-semblants et les phrases hypocrites, ils organisent la rupture.Le FN gagnantCette comédie des luttes de pouvoir signe la deuxième défaite de Sarkozy qui espérait avoir neutralisé les ambitions rivales, en les dressant les unes contre les autres pour garder la main sur l’UMP et préparer son éventuel retour. Les petites manœuvres du petit personnage lui explosent à la figure. Il aura perdu la présidentielle pour une large part du fait du seul rejet de sa personne et il est en train de perdre l’UMP qui solde les comptes.Copé avait pu croire sa route toute tracée en usant de la même démagogie réactionnaire et des méthodes de voyou que l’ex-président. Ce dernier a continué de jouer des rivalités des deux ennemis, préférant laisser derrière lui un champ de ruines plutôt que de favoriser la victoire de l’un ou de l’autre. Les gagnants de ce jeu de massacre des guignols sont le FN et Marine Le Pen : sa stratégie pour débaucher une large fraction de l’électorat de droite vient de recevoir un bon coup de pouce, qui pourrait ouvrir la porte à d’éventuelles alliances avec des courants ou des personnalités locales de l’UMP pour les municipales. Si la création d’un grand parti de droite extrême est à l’ordre du jour, la bataille ne fait que commencer pour savoir qui en assurera le leadership.Au-delà du vaudeville politique, la crise de l’UMP participe de la crise politique provoquée par la crise économique et financière. Elle affaiblit nos adversaires, pour peu que les travailleurs postulent à intervenir sur le terrain politique pour faire le ménage...Yvan Lemaitre
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