La sénatrice écologiste Aline Archimbaud a rendu un rapport sur « l’accès aux soins des plus démunis », et la ministre de la Santé Marisol Touraine a présenté « la stratégie nationale de santé ». Pendant ce temps, le saccage de la santé publique continue et le gouvernement défend un projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) entièrement compatible avec l’austérité européenne...Ce PLFSS pour 2014 prépare une nouvelle saignée des budgets de la santé et des hôpitaux. C’est le budget le plus dur depuis des années. Il prévoit pour la branche maladie une hausse des dépenses de 2,4 %, dont 440 millions d’économies supplémentaires sur l’hôpital, alors que le simple renouvellement des moyens (insuffisants) nécessiterait 4 %.
Un constat accablantLe constat fait sur le terrain par la sénatrice écologiste est vrai et accablant : elle enregistre le retard aux soins et l’aggravation des pathologies, le labyrinthe administratif, le mur financier… et aussi les refus de soins. Mais les 40 mesures proposées ne sont pas à la hauteur, bien que l’on y parle de lutte contre les dépassements d’honoraires… alors qu’ils sont maintenus par l’accord signé par M. Touraine avec les syndicats de médecins libéraux !La sénatrice veut retrouver l’esprit de la Couverture maladie universelle (CMU) de 1999 qui serait d’après elle de favoriser l’accès aux soins « en amont » et la prévention… Sans plus de précision. À l’époque, nous avons été peu nombreux à dire que la CMU était une fausse bonne idée, caritative et non égalitaire, bref un faux progrès. La vraie égalité était et reste une seule Sécu, la même pour tous, remboursant à 100 % l’ensemble des soins prescrits, et non pas une CMU « ciblant et discriminant » les plus démunis. Alors « l’esprit CMU », non merci !La généralisation du tiers payant (pas d’avance des frais) annoncée par la ministre de la Santé serait une vraie bonne nouvelle si elle ne s’appliquait pas à dose homéopathique ! Une mesure palpable aurait pu être la suppression nette et franche des franchises. Il n’en est pas question…
Rompre avec la logique de rentabilitéAméliorer l’accès aux soins nécessiterait d’améliorer les urgences des hôpitaux sursaturées avec des lits dans les couloirs et un personnel insuffisant et à bout de nerfs, situation qui engendre inévitablement la montée des violences… Cela sera impossible avec ce PLFFS, et sans sortir de la loi Bachelot (HPST) faite par la droite.Améliorer l’accès aux soins par des maisons de santé pluri-disciplinaires mais libérales et donc payantes ? Alors qu’on ne dit rien des centres et dispensaires de santé qui pratiquent déjà le tiers payant et le salariat médical, et qui sont laissés à l’agonie financière, sans budget suffisant, jusqu’à la fermeture. Et les déserts médicaux ? Et la liberté d’installation maintenue ?Vouloir sortir du paiement à l’acte pour les médecins libéraux ? Bonne idée, mais en gardant le « paiement à l’acte » des hôpitaux que constitue leur financement « à l’activité » (dit T2A)... Quelle contradiction !
Améliorer vraiment l’accès aux soinsAméliorer l’accès aux soins en psychiatrie ? Alors que dans ce domaine, le gouvernement poursuit la destruction du seul modèle de soins gratuits intégrés, dans et hors l’hôpital : la politique de secteur qu’il faudrait restaurer pleine et entière et même diffuser à toute la santé.Améliorer l’accès aux soins, c’est aussi la prévention. Mais la médecine scolaire et la protection maternelle et infantile (PMI) sont délaissées et la médecine du travail abandonnée au patronat.Décidément, ces rapports partent d’un constat de terrain vrai et accablant, mais pour aboutir à des mesures non chiffrées, au mieux caritatives (le fameux « esprit CMU » !). En fait, ils ne servent que de paravents pour cacher la poursuite du massacre de notre système de santé, notamment par la prochaine loi de financement de la Sécurité sociale.
Jacques Cordoba