La situation dans les urgences des hôpitaux ne cesse de se dégrader depuis une vingtaine d’années, Cet été, « la situation des urgences est totalement chaotique », comme l’affirme l’Association des médecins urgentistes de France (AMUF).
Quinze jours après le début des vacances, des services d’urgences sont déjà fermés par manque d’effectifs soignants, d’autres n’assurent plus leur service 24 heures sur 24, des milliers de lits sont fermés, et l’urgentiste Patrick Pelloux accuse le ministère « de planquer les chiffres ».
« Mise en danger de la vie d’autrui »
175 médecins ont écrit au Premier ministre : « On est dans le désastre pur et simple, nous vous alertons sur une mise en danger de la vie d’autrui et non-assistance à personne en danger, mise en danger de la population et mise en danger des professionnels qui doivent remplir cette tâche sans en avoir les moyens […]. Les décès médiatisés survenus récemment ne sont pas des faits isolés, ils sont les signes patents de la dégradation nationale des services hospitaliers. »
L’agence régionale de santé (ARS) d’Île-de-France reconnait que 600 plages horaires de 24 heures manqueront d’un médecin durant les deux mois de vacances, tous établissements confondus. Le ministère fait discrètement appel à la réserve sanitaire, des professionnels de santé retraités volontaires censés intervenir seulement lors de situations sanitaires exceptionnelles (épidémies, catastrophes, attentats), mais reconnaît que « les ressources de la réserve sanitaire peuvent ne pas être en adéquation avec les besoins exprimés ».
Les réponses à la crise : affligeant !
Thomas Mesnier, médecin urgentiste et député LREM, a été chargé d’un rapport par le gouvernement afin d’apporter des propositions. Il propose d’impliquer les médecins et les autres professionnels de santé (infirmiers, kinés, pharmaciens) dans la prise en charge de soins non programmés et de mettre en place un « numéro de santé » unique, le 15. Son analyse : « L’accès aux médecins généralistes est parfois difficile, et les urgences offrent l’accès aux soins pour tous, sans avance des frais, avec la possibilité de consulter des spécialistes. » Il n’envisage pas la gratuité des soins sans avances des frais mais « plus de pédagogie à l’attention des patients pour expliquer comment bien utiliser le système de soins, et une réflexion sur une meilleure coordination en ambulatoire afin d’accueillir plus de patients ». Et il refuse de soumettre les médecins libéraux à la moindre obligation (gardes, installations…).
Agnès Buzyn, la ministre de la Santé, le conforte : « Il faut que les citoyens soient raisonnables, qu’ils aillent aux urgences pour les vraies urgences vitales, et que dès qu’ils peuvent être pris en charge par un médecin généraliste, qu’ils fassent le choix d’aller le voir plutôt que d’arriver directement aux urgences. »
Le gouvernement est dans l’incapacité d’apporter des solutions car il refuse de reconnaître que la crise des urgences est le reflet de la crise des hôpitaux (fermetures de 100 000 lits en vingt ans), et de l’ensemble du système de soins rongé par des politiques de santé qui n’ont pour logique que la rentabilité et le profit.
S. Bernard