En même temps qu’il pratique le chantage aux déficits publics pour justifier sa politique d’austérité, le gouvernement étudie des aménagements du système fiscal qui en accentuent l’injustice.Sarkozy l’avait annoncé à grand renfort de publicité en novembre, il allait s’atteler, lui, ses ministres et les députés UMP, à une grande « réforme de la fiscalité ». Dans ses vœux, il a indiqué qu’il s’agissait de protéger les Français des « délocalisations », formule mensongèrequi voudrait laisser croire qu’il s’agit de protéger les salariés là où il n’est question que de rassurer les détenteurs de capital, les plus riches.
En réalité, loin de la réforme annoncée, il s’agira surtout de bricolages. L’objectif en serait avant tout la suppression, en même temps que celle du bouclier fiscal, de l’impôt sur les grandes fortunes (ISF). Et comme celui-ci rapporte 4 milliards d’euros par an, il s’agit de trouver un moyen de remplacer cette recette.
Plusieurs pistes sont à l’étude mais la plus simple, celle qui consisterait à augmenter le taux d’imposition pour les revenus les plus élevés ayant été écartée par Sarkozy, d’autres solutions beaucoup plus alambiquées sont avancées. Il a été question par exemple de taxer les plus-values immobilières sur la résidence principale, à la vente de celle-ci. Mais cela toucherait plusieurs millions de personnes là où l’ISF en taxait quelques milliers. D’où l’idée de ne taxer qu’au-delà d’un certain montant. Du coup, certains, parmi les parlementaires UMP chargés de réfléchir au projet, s’en tiennent à de simples aménagements de l’ISF, dont l’exonération de la résidence principale.Tout cela n’est guère passionnant mais promet beaucoup de discussions au sein même de la droite au moment où les parlementaires UMP seront à coup sûr soucieux de se démarquer du gouvernement d’une manière ou d’une autre. Le ministre du Budget, François Baroin, a déclaré lui-même qu’il se fixait comme tâche « d’aboutir à un consensus entre la majorité et le gouvernement ». La tâche sera peut-être d’autant plus ardue que le nouveau chef de l’UMP, Jean-François Copé, risque bien de faire de la surenchère, sur la droite de Sarkozy, en proposant comme il l’a fait récemment une TVA antidélocalisation. Un autre nom pour la TVA sociale que défendait Sarkozy en 2007 mais qu’il n’a pas appliquée. D’autres gouvernements en Europe ont augmenté, dans le cadre de leurs plans d’austérité, la TVA, l’impôt le plus injuste qui soit puisque non seulement il taxe de la même façon millionnaires et smicards, mais qu’en outre, il taxe tous ceux qui ne sont pas imposables à travers l’achat des biens de consommation les plus indispensables. 8 % d’impôt pour les entreprises du CAC 40À côté de cela, on apprend, dans une édition récente du Journal du Dimanche qu’un quart des entreprises du CAC 40 n’a pas payé un centime d’euro d’impôts en 2009. C’est le cas de Total malgré ses 8 milliards d’euros de bénéfices cette année-là, Danone, Essilor, Suez, Saint-Gobain, Schneider. L’enquête du JDD confirme que les entreprises du CAC 40 ne paient d’impôts en moyenne qu’à hauteur de 8 % de leurs revenus. Et par ailleurs dans leur livre La Révolution fiscale, paru ces jours-ci, Camille Landais, Thomas Piketty (qui a été conseiller de Ségolène Royal) et Emmanuel Saez, démontrent que l’impôt sur le revenu, loin d’être progressif, est régressif, c’est-à-dire que plus on est riche et moins on paie d’impôt.Alors, à l’heure où les déficits de l’État sont invoqués pour aggraver l’austérité que paient les plus pauvres, la première urgence est de refuser ce chantage. La dette de l’État atteint des montants faramineux parce que celui-ci subventionne à tout va les banques et les multinationales, parce qu’il a inventé pour eux toutes sortes d’exonérations d’impôts et de cotisations sociales, parce qu’il leur offre en outre la possibilité de s’enrichir grâce au marché de la dette. La seule solution juste, c’est de faire payer les riches, les détenteurs du capital, l’annulation de la dette publique, le contrôle des travailleurs et de la population sur les comptes des grandes entreprises et de l’État !Galia Trépère