Le gouvernement a récemment indiqué qu’il envisageait de réformer les prud'hommes, et notamment de modifier le mode d’élection des juges, qui ne seraient plus élus au suffrage universel.Les conseils de prud’hommes sont les juridictions chargées de juger les litiges individuels du travail. Ce sont eux qui, par exemple, peuvent accorder des dommages et intérêts aux salariés abusivement licenciés. Ces juridictions ont la particularité de n’être pas composées de magistratEs professionnelEs, mais de juges éluEs, pour moitié salariéEs, pour moitié employeurEs. À en croire les déclarations de Taubira, en les réformant, il s’agirait d’améliorer le fonctionnement de la justice du travail.Il est certes indéniable que les conseils de prud’hommes fonctionnent mal et rendent, au détriment des salariéEs, une justice au rabais. Le manque de moyens est criant, les délais sont inacceptables, parfois trois ans lorsque le code du travail prévoit un mois maximum, les décisions rendues sont souvent très en-deçà de ce que devrait dicter l’application, même a minima, du droit du travail. Et pour faire bonne mesure, la saisine de ces juridictions est devenue payante !
Faire appliquer le droit du travailDans les prochains mois, le débat sera donc ouvert : le patronat y participe déjà, lui qui ne cesse de dénoncer une justice selon lui beaucoup trop favorable aux salariés. Les organisations professionnelles d’avocats font pression sur le gouvernement pour que le recours à un avocat, aujourd’hui facultatif, soit rendu obligatoire, ce qui aurait pour conséquence de dissuader de nombreux salariéEs de faire valoir leurs droits.De leur côté, les grandes organisations syndicales, y compris la CGT, brillent par la mollesse de leurs positions. Elles ont en effet tendance à idéaliser la justice prud’homale et les décisions qu’elle rend dans le but de glorifier le bilan des juges issus de leurs rangs. Des juges qui d’ailleurs, trop souvent, se métamorphosent en notables coupés des réalités au bout de quelques années de mandat.Autant dire qu’il est urgent que les salariéEs se saisissent de la question. La défense de la justice du travail est en effet un enjeu majeur puisqu’il est illusoire de penser que le droit du travail puisse être effectif s’il n’existe pas de juges pour sanctionner la violation des règles qu’il pose.
Bruno Toussaint