Publié le Samedi 2 mars 2013 à 09h20.

Renault : la régression sociale

Malgré des grèves à répétition depuis décembre, le rapport de forces est resté insuffisant pour bloquer la signature de l’accord de compétitivité.Mardi 19 février, Renault a clos la négociation de l’Accord de compétitivité applicable à tous ses établissements situés en France, ainsi qu’à ses sept filiales industrielles, telles que les usines Sovab de Batilly, MCA de Maubeuge ou STA de Ruitz. En raison des multiples régressions dont il est porteur, la direction s’est réjouie de la signature prochaine d’un accord qui devrait lui permettre d’abaisser de 300 euros le coût moyen de production de chaque véhicule fabriqué en France. Ce qui a conduit le directeur des opérations France à déclarer : « Un accord de cette ampleur, à 360°, n’est pas fréquent. Il illustre ce à quoi la qualité du dialogue social permet d’aboutir ». C’était la condition mise par le constructeur pour prétendre s’engager à ne pas fermer des sites de production et ne pas faire de « plan social » jusqu’à 2016.Syndicalisme du styloLa CFE-CGC a annoncé vendredi dernier qu’elle signerait l’accord, qualifié « d’équilibré » en considérant qu’il « représente le levier de changement durable de la stratégie et de l’activité industrielle de Renault en France, par delà les incertitudes de l’évolution du marché en Europe ». La CFDT, qui a également jugé l’accord « globalement équilibré », devrait se prononcer la semaine du 5 mars. Ce qui n’empêche pas son nouveau patron, Laurent Berger, « de voir des avancées, notamment une charge de production de voitures plus importante sur les sites français qui garantit l’activité de production jusqu’en 2016 ». Pourtant, les engagements de Renault ne sont que du vent. Ils reposent sur une hypothèse improbable de croissance du marché automobile européen de 15 % d’ici 2016, qui permettrait au constructeur de progresser de 30 % en France.Un accord lourd de conséquencesLes arrêts de travail ont convaincu la direction qu’elle ne pourrait pas passer en force sur les détachements intersites obligatoires et elle a donc dû reculer sur ce point. Mais elle est parvenue à faire avaler par les futurs signataires la destruction des 7 500 emplois, l’allongement du temps de travail et le blocage des salaires en 2013. Pour les augmentations de salaires des années 2014 et 2015, elle n’a concédé que le remplacement des limites fixées à 0,5 % et à 0,75 % par l’acceptation que « des principes de modération salariale présideraient les négociations annuelles obligatoires ».C’est cet accord qui va servir de modèle à d’autres entreprises et de point d’appui à de nouvelles régressions. Déjà, la direction de PSA a prévenu que, dès qu’elle aura obtenu un « accord » sur la fermeture de l’usine d’Aulnay, elle engagera à son tour une négociation sur le même type d’accord. Se projetant déjà plus loin, les syndicats CFE-CGC et FO se sont adressés au gouvernement pour lui demander d’établir des « zones franches », à fiscalité et cotisations sociales réduites, autour des usines françaises de Renault et PSA et de leurs équipementiers. Selon le secrétaire fédéral de FO chargé de l’automobile, cela « […] permettrait de préserver les emplois et les usines, voire de relocaliser une partie de la production ». Ce à quoi le PDG de Renault s’est déclaré « totalement favorable » !Régis Louail