Présenté au Conseil des ministres ce mercredi, le projet de loi relatif au dialogue social, qui fait suite à l’échec de la négociation interprofessionnelle sur ce thème, était censé opérer une conciliation entre revendications syndicales et patronales. Mais, avec ce gouvernement au service des puissants et en guerre contre les classes populaires, il n’est pas difficile de voir de quel côté penche la balance...
Une représentation en toc dans les TPEPrésentée comme l’avancée sociale majeure du texte, la loi instaure des commissions paritaires interprofessionnelles pour les entreprises de moins de 11 salariéEs dépourvues de représentation du personnel, dans les futures treize grandes régions. Rien de satisfaisant dans cette mesure hormis le fait que les représentantEs syndicaux qui y siégeront seront élus par les travailleurs concernés lors de l’élection TPE de 2017 : en effet, l’article prévoit expressément que « les membres de la commission n’ont, pour l’exercice de leurs fonctions, pas accès aux locaux des entreprises », là où il aurait fallu, par exemple, étendre les prérogatives des conseillerEs du salarié qui y interviennent déjà lors des entretiens de rupture.
Un marché de DUPLe peu qui est donné d’une main est vite repris de l’autre : ainsi, le seuil maximal de mise en place de la Délégation unique du personnel (DUP), qui peut regrouper comité d’entreprise (CE) et déléguéEs du personnel dans les entreprises de 50 à 200 salariéEs, est porté à 300. Surtout, le CHSCT, obligatoire à partir de 50, en fera désormais partie. Avec trois casquettes à porter plutôt qu’une et un nombre de représentantEs diminué d’un tiers, il y a fort à parier que, pour ces supers-éluEs, les questions économiques prendront le dessus sur celles relatives à la santé au travail. À défaut de sa suppression pure et simple, l’objectif d’amoindrissement du CHSCT poursuivi par le patronat, est rempli, y compris en permettant, dans les grandes entreprises, son rapprochement avec tout ou partie des autres instances par voie d’accord majoritaire.La détermination du nombre d’éluEs et des heures de délégation de cette DUP étendue sont renvoyés à des décrets : les syndicats, même les plus réformistes, accepteront-ils de signer ce chèque en blanc ? Plus encore, dans le cadre de la « rationalisation » des procédures d’information-consultation du CE (passage de 17 à 3 par an), une consultation ainsi qu’une expertise commune avec le CHSCT est instaurée.
Partenaires ou adversaires sociaux ?Il sera aussi possible de négocier la périodicité des négociations, la négociation annuelle obligatoire pourra ainsi se tenir non plus chaque année mais… tous les trois ans ! La modération salariale, dictée par Bruxelles, est ainsi encouragée tout comme le développement de la négociation d’entreprise, y compris en l’absence de délégué syndical, avec le but avoué de faire du code du travail une simple référence supplétive sur lequel l’accord l’emporterait.La lutte contre la discrimination antisyndicale est abordée de manière prude là ou une politique ambitieuse serait de transposer les préconisations de l’observatoire contre la discrimination et la répression antisyndicale : « L’engagement syndical ou dans un mandat de représentant du personnel est aujourd’hui trop souvent perçu par les salariés comme une source de discrimination ou, à tout le mois, de frein à la carrière. »Rien sur la responsabilité des patrons pour qui Macron, dans le même temps, amoindrit la portée du délit d’entrave au fonctionnement des instances représentatives du personnel ! Tout juste est-il prévu l’instauration d’un mécanisme garantissant à ceux dont les heures de délégation représentent au moins 30 % de leur temps de travail une augmentation en cours de mandat au moins égale à la moyenne des augmentations individuelles.À noter que ce texte prévoit aussi la création d’une prime d’activité, fusion de celle pour l’emploi et du RSA, soit le maintien d’une classe de travailleurs pauvres, et prétend sanctuariser le régime de l’intermittence au risque de l’isoler du régime général de l’assurance chômage et donc de la solidarité interprofessionnelle. Il devrait être débattu avant cet été à l’Assemblée nationale sauf accélération de la crise du PS lors de son congrès. Au même titre que la loi Macron dont la partie relative à la médecine du travail devrait finalement être reprise, exigeons-en le retrait !
LD