Publié le Dimanche 17 juillet 2022 à 12h00.

Le numéro 55 du journal l’Envolée interdit en prison

Nous relayons un texte de la rédaction du journal l’Envolée.

Des prisonniers et des proches nous ont informés que dans plusieurs prisons, des surveillants sont intervenus pour confisquer le dernier numéro de l’Envolée : le n° 55, paru en mai 2022 ; ils sont même allés jusqu’à la fouille de cellule en cas de refus… Nous découvrons ainsi qu’une note interne de la direction de l’administration pénitentiaire (AP) interdit – au nom du garde des Sceaux – la lecture de ce numéro à toutes les personnes détenues à cause de l’article « Distribution de permis de tuer au tribunal de La Rochelle » ; il contiendrait en effet des « propos diffamatoires à l’égard de l’AP […], ainsi qu’à l’encontre des personnels pénitentiaires dont elle assure la formation ».

Cet article n’est pourtant que le récit du procès auquel nous avons assisté au tribunal de La Rochelle fin novembre 2021. Sept surveillants y étaient jugés pour leur responsabilité dans la mort par étouffement de Sambaly Diabaté en août 2016 à la prison de Saint-Martin-de-Ré. La note de l’AP pointe certains passages où elle voit « des propos alléguant que l’administration pénitentiaire enseigne à ses personnels des gestes professionnels portant atteinte à la dignité de la personne humaine, qualifiés par l’auteur de l’article d’"arsenal habituel" et d’"horreur tellement banale et généralisée" tels que "étranglement, pliage, pose de bâillon"… »

Les auteurs de cette note s’inquiètent en outre de la gratuité du journal pour les prisonniers et prisonnières et de sa « large diffusion » qui seraient « de nature à engendrer un retentissement important auprès des personnes détenues ».

C’est la deuxième fois en deux ans qu’un numéro de l’Envolée est ainsi interdit en détention ; le précédent – le n° 52 – avait en prime fait l’objet d’une plainte pour diffamation – dont on reste sans nouvelles à ce jour. Ce qui avait alors justifié l’interdiction, c’était tout un dossier… qui portait déjà sur les violences pénitentiaires et les morts « suspectes ». C’est on ne peut plus clair : l’AP entend faire taire celles et ceux qui osent soutenir que les pratiques de ses agents mettent en danger l’intégrité physique des personnes dont ils ont la charge – alors que c’est hélas une évidence pour tous les premiers concernés –, et que cette violence est constitutive de la prison. Ces interdictions à répétition et leur pénible cortège de saisies en cellule visent également à mettre la pression aux abonnéEs de l’intérieur et à dissuader les autres enferméEs d’entrer en relation avec l’Envolée ou de recevoir le journal. Il est scandaleux que nos abonnéEs subissent de telles intimidations, et nous étudions tous les recours envisageables avec nos avocats.

L’article incriminé : https://lenvolee.net/proces-des-surveillants-responsables-de-la-mort-de-sambaly-diabate/