Pierre Avot-Meyers était né le 8 juillet 1930 à Paris. Il était entré dans la vie active en 1946. Il avait adhéré à la CGT dès 1948. En octobre 1949, il était embauché comme OS chez Chausson à Gennevilliers. Il débutait à l’atelier MO, sur la chaîne d’assemblage des carrosseries « en blanc » (Ford et Vedette).
Après son service militaire (Octobre 1950 – Mai 1952), il était muté à Meudon, où il travaillait en équipes, à l’atelier des grosses presses. Il était de retour en 1953, à Gennevilliers à l’usine G, d’abord sur la chaîne des cars et de nouveau à l’atelier MO, au ferrage des carrosseries Simca (Versailles, Beaulieu, Chambord…). Il a été délégué CGT du personnel de 1954 à 1958, date à laquelle il quittait l’entreprise.
Il était membre du Parti Communiste Internationaliste (trotskiste) depuis 1949. Il a participé (été 1950) à la brigade des jeunes de chez Chausson en Yougoslavie. Il s’est engagé dans le soutien au FLN pendant la guerre d’Algérie. Un engagement qui n’était pas sans risque. En 1960, la police découvre l’imprimerie clandestine de la IV e Internationale, en Région parisienne. Il est pourchassé par des agents de la DST. Il doit se réfugier en Italie.
Il vit en Algérie après son indépendance, il devient collaborateur du journal du F.L.N. El Moudjahid.
Le 19 juin 1965, Houari Boumediene et les militaires réalisaient un coup d’état. Pierre Avot- Meyers était arrêté dans la nuit du 2 septembre, par des policiers en civil, sans aucun mandat d’amener, d’arrêt ou de perquisition. Avec Simonne Minguet, ils opposent une vive résistance, ils sont frappés, enchaînés et conduits au siège de la Police des Renseignements Généraux où ils sont interrogés. Pierre s’en tirera avec la fracture d’une côte et diverses blessures. Ils sont incarcérés et mis au secret durant trois semaines, puis expulsés vers la France.
Pierre entame une nouvelle carrière professionnelle, il devient correcteur de presse au Canard enchaîné, à l’Encyclopédie Universalis. Il collaborait bénévolement aux éditions Syllepse où il corrigeait les épreuves de différents ouvrages.
C’est en 2001, que je rencontrais pour la première fois Pierre, lors d’une réunion de militants de chez Chausson. Un groupe de travail s’est constitué, il comprenait des syndicalistes de la CGT et de la CFDT, l’ouvrage "Chausson : une dignité ouvrière", se construira. Outre l’intérêt de son témoignage sur les conditions de travail dans l’entreprise, il nous fit découvrir un événement oublié – celui de la Brigade Commune de Paris – constituée d’une quinzaine de jeunes de chez Chausson qui à l’été 1950 était parti en Yougoslavie soutenir le socialisme autogestionnaire initié par Josip Broz Tito.
Pierre nous a apporté son capital intellectuel, ses connaissances, ses exigences de correcteur de presse dans l’élaboration, la rédaction de l’ouvrage. Le livre édité chez Syllepse, préfacé par Michel Verret, a fait date. Il est à ce jour, le seul ouvrage qui retrace l’histoire industrielle et sociale d’une entreprise, sur un secteur industriel (Asnières – Gennevilliers) qui en comptait d’innombrables.
Nous garderons en mémoire, sa gentillesse, son sourire, son dévouement sans compter au mouvement ouvrier progressiste. L’association « Chausson : une dignité ouvrière », présente à sa compagne Dany et à son fils Benoît, leurs condoléances.
Daniel Grason.
Chausson : une dignité ouvrière, Bernard Massèra & Daniel Grason, Préface Michel Verret, Syllepse 2004.
Les camarades des frères – Trotskistes et libertaires dans la guerre d’Algérie, Sylvain Pattieu, Préface de Mohammed Harbi, Syllepse, 2002.
Les torturés d’El Harrach, Préface Henri Alleg, Introduction de Robert Merle, Ed. Minuit 1966.
Les obsèques de notre camarade Pierre Avot-Meyers auront lieu, ce mercredi 10 juin 2009, à 15 heures 20, au crématorium du Père-Lachaise. Entrée rue des Rondeaux (Paris 20e) – Métro : Gambetta.