« Mon pays à moi, femme, c’est le monde entier » : cette citation de Virginia Woolf, femme de lettres féministe du 19e siècle, était reprise dans l’appel à manifester « Toutes aux Frontières » le 5 juin 2021 contre les politiques européennes de fermeture des frontières et de criminalisation des migrantEs.
Les femmes fuient les guerres, les persécutions, les famines comme les hommes, mais elles fuient aussi les violences spécifiques, les mutilations sexuelles, les mariages forcés, les séquestrations et dans les pays en guerre, les viols pratiqués massivement comme arme de destruction. En même temps, elles ne sont pas seulement victimes, elles aspirent à un meilleur avenir, à être plus libres, elles peuvent aussi partir à la recherche de meilleures conditions de vie. Les raisons de leurs migrations sont complexes et multiples.
Plus de la moitié de la population migrante
Le durcissement des politiques migratoires et les fermetures des frontières les pénalisent particulièrement. Elles sont d’autant plus vulnérables à toute sorte de violences et d’abus qu’elles sont surexploitées et que leurs droits les plus élémentaires sont bafoués lors de leur migration où rien n’est fait pour les accueillir. En effet, les politiques, et c’est particulièrement vrai pour la France, instrumentalisent à l’envi le discours féministe prétendant « sauver les femmes » alors qu’au contraire le droit d’asile se réduit, l’hébergement manque et engraisse les marchands de sommeil, l’accès à l’emploi est trusté par des entreprises de sous-traitance qui sous-payent et précarisent.
Plusieurs études de chercheuses féministes (citées dans les Damnées de la mer, femmes et frontières en Méditerranée de Camille Schmoll) démontrent que les femmes ont arpenté les chemins de la migration dès la fin du 19e siècle. Selon elles, il est plus facile de construire la représentation de l’étranger dangereux et envahisseur à travers une image masculine. « Mais cette invisibilisation des femmes n’est pas uniquement le fait des détracteurs de la migration. Elle a des racines profondes qui ont trait à la difficulté à se représenter les femmes migrantes en tant que sujets politiques. »
Nous devons exiger une création massive de lieux d’hébergement permettant un accueil dans la dignité, une prise en charge des questions de santé et un accompagnement vers l’emploi qualifié, la fermeture des Centres de rétention administrative et la suppression de l’enfermement dans les zones d’attentes, à l’arrivée dans les aéroports. Mais aussi des démarches simplifiées pour la régularisation et une réelle prise en compte des faits de violences spécifique pour l’accès au statut de réfugié pour les femmes et les personnes LGBTI, la reconnaissance du viol comme une arme de guerre, l’application effective, immédiate et sans condition de la protection internationale pour les victimes de la traite des êtres humains, et une individuation des droits – non dépendants du mari ou du père – pour l’obtention des titres de séjour pour les femmes.