La grève féministe de ce 8 mars s’inscrit dans un contexte spécifique, en plein mouvement social contre la réforme des retraites, alors que l’intersyndicale a décidé de s’emparer du 7 et du 8 pour en faire des journées de la mobilisation et durcir le bras de fer avec le gouvernement, notamment en posant la question de la reconductible.
La dimension féministe de la lutte contre la réforme des retraites est très claire depuis le début. En effet, 40 % des femmes partent à la retraite aujourd’hui avec une retraite incomplète, pour diverses raisons : elles sont plus nombreuses à être employées à temps partiel (un tiers des femmes), elles ont des carrières hachées parce qu’elles sont assignées à la prise en charge des enfants ou des personnes dépendantes. En outre, à travail égal elles gagnent en moyenne 28 % de moins que les hommes dans le privé : la ségrégation de l’emploi concentre les femmes dans certains secteurs qui sont socialement dévalorisés et moins bien payés. Enfin le « plafond de verre » freine leur carrière. Elles gagnent moins, et donc elles cotisent moins, et les écarts de pensions s’élèvent à 42 % !
60 % des « économies » voulues par la réforme des retraites se font sur les femmes
À l’heure actuelle, presque la moitié des femmes ne parviennent pas à partir à la retraite à 62 ans à taux plein. Ajouter deux ans ne ferait qu’accentuer une situation déjà dramatique. Le gouvernement le reconnaît lui-même puisque son étude d’impact de la réforme a montré que l’allongement de la durée de cotisation va toucher les femmes plus que les hommes : parmi les personnes nées en 1972, les femmes devront travailler 9 mois supplémentaires, contre 5 mois pour les hommes !
Michaël Zemmour, économiste qui a attiré l’attention sur les mensonges du gouvernement autour de la « pension minimale » à 1 200 euros (qui n’existe pas dans le projet de réforme), a également montré que le profil type des personnes les plus impactées par la réforme sont les femmes qui peuvent partir à taux plein à 62 ans grâce à la validation des trimestres acquis du fait d’avoir un ou plusieurs enfants. À cause de l’allongement, la compensation ne jouera quasiment plus. 60 % des « économies » de la réforme se font ainsi sur les femmes, soit quasiment une femme sur quatre. Par ailleurs, cette réforme va augmenter la précarité des seniors, en particulier la catégorie qui se retrouve sans emploi et qui n’a pas encore accès à la retraite (40 000 personnes de plus au RSA, 90 000 personnes de plus au chômage). Or, là encore, les femmes sont plus nombreuses dans cette catégorie que les hommes.
Pour la prise en compte de la pénibilité des métiers féminisés
En outre, il n’est pas tenu compte de la pénibilité spécifique des métiers les plus féminisés, en particulier le travail de soin et ce qu’il implique – le port des personnes, les postures pénibles, la charge émotionnelle, etc. Enfin, la réforme va également impacter tout particulièrement les LGBT pour des raisons qui se recoupent en partie : ces dernierEs sont également touchéEs par les carrières hachées et sans perspectives d’avancement, en raison des discriminations et violences avant et après l’embauche, et qui mènent souvent au chômage. Sans compter que le changement d’état civil peut rendre difficile la reconnaissance de tous les semestres de cotisation.
Face à une telle attaque antisociale et antiféministe, nous devons répondre ce 8 mars par la grève féministe, soit la grève du travail salarié et du travail reproductif (soin des enfants, de la maison, prise en charge des tâches domestiques, de la charge mentale, etc). Cette année, la grève féministe, avec la perspective de la grève reconductible, peut devenir une grève générale féministe.
Pour faire reculer le gouvernement, nous devons faire converger toutes les forces ! À partir du 7 mars, il faut organiser le blocage du pays. Le lendemain, 8 mars, nous devons mettre en avant le rôle essentiel que jouent les femmes dans la société et les conséquences pour elles de la réforme des retraites. Ce jour-là nous pouvons bloquer une nouvelle dimension de l’économie, celle liée au travail de reproduction qui reste largement invisibilisé. 7 mars, 8 mars… on arrête tout, on bloque tout, jusqu’au retrait total !