Publié le Mercredi 14 février 2024 à 10h15.

Faire résonner une voix internationaliste en rupture avec leur construction européenne

Même si c'est à prendre comme il se doit avec des pincettes, sondage après sondage le Rassemblement national s’affirme comme le parti que le résultat des prochaines élections européennes va mettre à la première place….

Il est tout à fait probable que l’on assiste alors au renforcement d’un bloc massif d’extrême droite dominé par le RN, et idéologiquement épaulé par Reconquête, le parti de Zemmour, regroupant ainsi un gros tiers des voix. Ce bloc profite à plein de la fuite en avant nauséabonde des politiques mises en place par le macronisme et s’appuie aussi sur la progression des forces ultraréactionnaires à l’échelle internationale.

Contre l’Europe de la concurrence qui nourrit les extrêmes droites…

Depuis le Traité de Rome de 1957, acte de naissance de la construction capitaliste européenne, tous les choix politiques ont été faits pour construire une Europe anti-démocratique, celle des marchés et de la concurrence, favorisant la libre circulation des marchandises, des biens, des services et des capitaux. Dans le même temps, cette Europe a renforcé ses frontières, fermant les ports aux embarcations qui transportent les migrantEs et s’appuyant sur des dispositifs de surveillance comme Frontex (née en 2004). Bien éloignée des mythes ­fondateurs ­humanistes qui auraient présidé à sa fondation, la construction de cette Europe forteresse, celle de la « concurrence libre et non faussée » (ce dogme libéral qui tient lieu de régulation au « marché unique »), a été imposées aux peuples par des institutions pour la plupart non élues, la seule soumise au suffrage universel, le Parlement européen, n’ayant quasiment pas de pouvoir de décision.

Antisociale, antidémocratique, raciste…Il est logique que l’extrême droite se nourrisse de ce cadre pour s’en faire aujourd’hui les hérauts les plus conséquents, à défaut d’en porter les habits. Dans toute l’Europe, les partis d’extrême droite combinent la rhétorique du repli et de la défense de leur nation respective avec un logiciel politique de plus en plus compatible avec cette construction européenne. Il en est ainsi du RN ici, comme des post­fascistes de Fratelli d’Italia (le parti de Giorgia Meloni, la présidente du Conseil), des néofranquistes de Vox en Espagne, de Droit et justice (PiS) en Pologne, jusqu’au Fidesz du président hongrois Viktor Orbán.

Si toutes ces forces peinent encore à s’entendre à l’échelle de l’Union, toutes se sont renforcées ces dernières années et peuvent profiter du désordre social (dérégulations, mise en concurrence des services publics, concurrence et dumping au sein de l’Union européenne…) et de l’Europe des barbelés, fruits pourris des politiques libérales mises en place par l’Union européenne des 27.

Face à la sédimentation dangereuse de ces forces, faire exister une gauche de rupture porteuse d’un autre projet de construction européenne est un enjeu primordial.

Construire l’Europe des solidarités, celle des travailleurs et des peuples

La lutte entre les grands pôles impérialistes à l’échelle internationale — dont les guerres (à commencer par celle en Ukraine) sont l’expression la plus brutale et la plus crue — telle sera la toile de fond des prochaines élections européennes

Contre les forces belliqueuses, cela rend d’autant plus urgent la nécessité d’incarner une perspective internationaliste concrète, qui refuse la mise en concurrence des peuples : sur les marchés comme force de travail, en refusant de dresser des frontières entre pays comme autant de remparts insurmontables, sur les champs de batailles… Tracer une perspective d’émancipation basée sur la coopération, opposée à la pratique actuelle des néolibéraux de gauche comme de droite, et pire encore à la société cauchemardesque que nous promettent les extrêmes droites européennes.

Début octobre, dans un contexte encore marqué par l’affrontement sur la contre-r­éforme des retraites, le soulèvement des quartiers populaires (à la suite du meurtre de Nahel en juillet dernier) et de grandes mobilisations contre différents projets écocides, nous nous sommes publiquement adressés aux forces du mouvement ouvrier pour participer au rassemblement d’une gauche de combat dans les urnes. En continuant les discussions entamées avec La France insoumise début décembre, nous voulons mener cette bataille pour regrouper une gauche qui exige la remise en cause démocratique des traités de l’UE, qui veut rompre avec le cours des institutions actuelles, qui veut porter des priorités de justice sociale, environnementale et d’égalité. Ce serait la plus utile des contributions à un projet écosocialiste ces prochains mois.