Si la séquence des retraites qui s’est engagée cette semaine va durer plusieurs semaines, on ne peut pas s’attendre à ce que le gouvernement suspende ses autres offensives réactionnaires et liberticides, bien au contraire. Nous devons donc continuer à animer tous les fronts de lutte déjà ouverts en cherchant à les articuler avec la mobilisation sur les retraites. Notre boussole, c’est que, loin d’être une diversion, la construction de ces mobilisations aide à unifier et renforcer notre camp social dans le contexte de la bataille des retraites.
Se mobiliser pour les droits des femmes et des LGBTI, pour défendre l’eau
La première échéance d’ampleur nationale et la plus évidente à raccrocher au combat pour la défense de nos retraites est la grève des femmes, la grève féministe autour de la journée du 8 mars. La place spécifique prise, y compris dans les argumentaires syndicaux, par l’enjeu de l’égalité salariale pour lutter contre la faiblesse des pensions des femmes (inférieures de 40 %) en même temps que d’abonder les caisses de la Sécurité sociale (plus 10 milliards par an), sera indéniablement un point d’appui comme il l’a été en 2019. Notre axe sera de développer la nécessité d’un mouvement autonome des femmes pour porter dans la durée et sous ses propres formes, dans le cadre du mouvement général, ses revendications : la grève des femmes, la question du travail reproductif, de la charge mentale, des enjeux du soin aux enfants et aux personnes en perte d’autonomie en articulation avec la lutte pour les services publics de la petite enfance, du handicap et du grand âge.
Les LGBTI seront également spécifiquement touchéEs par la contre-réforme des retraites. L’exclusion du salariat, particulièrement pour les personnes trans, et les inégalités salariales et les discriminations à l’embauche, qui persistent pour celles et ceux qui font leur coming-out, impactent sur le montant des pensions. Si elle était appliquée, la contre-réforme viendrait donc précariser les LGBTI. La pandémie de VIH/Sida et les parcours de transition ont aussi pu amener à des carrières hachées, une retraite à taux plein devenant ainsi impossible avec une pension à taux réduit. De plus, quand une personne a des problèmes de santé et que les pensions sont trop faibles, la famille est souvent une structure sur laquelle beaucoup doivent s’appuyer pour pallier la dégradation de nos protections sociales. Les LGBTI n’ont pas les mêmes possibilités de compter sur la structure familiale à cause du potentiel rejet de leurs familles et de l’interdiction d’avoir pu construire les leurs pendant des années.
Nos réponses à la contre-réforme sur les retraites, c’est « travailler moins » en réduisant le temps de travail, en augmentant les congés payés, en baissant l’âge de la retraite. Mais c’est aussi poser la question : quoi produire et pour quels besoins sociaux ? Dans quelles conditions pour les êtres vivants et la planète ? Pour qui ? Et qui décide ? Des préoccupations qui ne manqueront pas de s’inviter dans les AG de grève pour alimenter la détermination, d’autant qu’elles entrent en écho aux diverses formes de la crise écologique (lutter contre le réchauffement climatique, ne subir ni la crise énergétique ni la crise alimentaire). La construction de l’échéance des méga-bassines les 25 et 26 mars à Sainte-Soline sera une priorité du fait de sa visibilité nationale et du niveau de confrontation politique et répressive auquel le gouvernement a mis la barre. […]
Contre la loi Darmanin et la loi Kasbarian
Deux autres projets de loi sont dans les tuyaux législatifs qui visent les plus précaires de notre camp. L’enjeu est d’empêcher ces lois d’être votées, en construisant des liens avec la bataille des retraites.
C’est d’abord la loi Darmanin, qui se situe entièrement sur le terrain de l’extrême droite, qui vise à systématiser et encadrer le droit au séjour par les seuls besoins économiques ponctuels. À l’opposé, nous défendons la liberté de circulation et d’installation pour touTEs les migrantEs, la régularisation des sans-papiers qui permettrait de plus, en luttant contre la trappe à bas salaires, de renflouer les caisses de retraite. Face aux idées rances de l’extrême droite, aux préjugés qui fleurent bon le suprématisme, nous opposons des principes, ceux de la solidarité pour défendre le droit de chacunE à vivre dignement là où elle /il le choisit. La préparation de la journée du 18 mars s’inscrit dans ce cadre.
C’est aussi l’enjeu de la mobilisation contre la loi Kasbarian, loi qui criminalise celles et ceux qui ne peuvent plus payer leurs loyers ou qui ne peuvent trouver un logement légal dans le contexte de libéralisation renforcée de la spéculation immobilière. Cette loi affaiblit les plus pauvres, parmi lesquels les retraitéEs touchant des pensions rognées par la décote des annuités, et le report de l’âge de départ, les femmes isolées et les migrantEs. Des luttes se développent aujourd’hui, éclatées et spécifiques à des contextes locaux (squats, occupations d’écoles, mobilisations contre les augmentations en flèche des charges locatives...). Les dates de mobilisations contre la loi Kasbarian (samedi 28 janvier) et à la fin de la trêve hivernale (fin mars) seront des échéances à construire.
Enfin la lutte contre l’extrême droite sera un enjeu déterminant de la mobilisation pour nos retraites. […]
Il nous faut également être capable dans le cours de la mobilisation, en nous appuyant sur le renforcement des luttes spécifiques, d’avancer dès que possible des mots d’ordre pour bloquer non seulement la contre-réforme des retraites mais aussi toute la politique du gouvernement Macron. Il y a besoin de construire une alternative politique en rupture avec Macron et son monde, jusqu’à l’extrême droite, une alternative qui parte des besoins des salariéEs de la jeunesse, des retraitéEs et qui s’appuie sur leurs mobilisations pour les imposer.