Sanofi, le numéro 1 français de l’industrie pharmaceutique, se retrouve largué dans la course au vaccin contre le Covid, ne propose aucun traitement pour lutter contre l’infection mais se permet de continuer le saccage de ses capacités de recherche et développement (R&D).
Sanofi est une entreprise qui se porte très bien. En pleine pandémie, elle a vu son bénéfice pour 2020 atteindre un record à 12,3 milliards, soit une hausse de 340 %. En France c’est, en 12 ans, plus de 5 000 emplois supprimés, 13 sites fermés, trois vendus, deux reconvertis, le tout accompagné d’une forte diminution de la masse salariale. Avec les annonces de juillet 2020, ce sont encore 1 000 emplois qui vont disparaître. À ce rythme, le groupe Sanofi en France comprendra moins de 20 000 emplois CDI en activité. Nous étions près de 29 000 en 2008.
Un réorganisation profonde
Aujourd’hui, plutôt que de se focaliser sur la lutte contre la pandémie, Sanofi annonce la suppression de, a minima, 364 postes dans la R&D, la fermeture du site de Strasbourg et la confirmation de l’arrêt de nombreuses activités en particulier en chimie. Sur le site de Montpellier, la direction veut supprimer 55 postes, essentiellement dans l’activité de développement chimique. Ce site connaît depuis plus de 10 ans un déclin inexorable : alors que nous étions 1 400 salariéEs en 2009 nous sommes moins de 900 CDI aujourd’hui ; les activités de recherche ont été abandonnées les unes après les autres et, comble de l’absurdité, un bâtiment de production chimique coûtant la bagatelle de 107 millions d’euros a été détruit avant même sa mise en service ! Le site de Montpellier est aujourd’hui tellement en dessous de ses capacités d’utilisation que de nombreuses surfaces sont louées à d’autres entreprises, la direction va même jusqu’à louer ses locaux vides aux entreprises prestataires réalisant la sous-traitance pour Sanofi.
Sur les sites de région parisienne (Chilly et Vitry) ce sont les activités de recherche qui sont frappées par les diminutions d’effectifs, la stratégie est de plus en plus claire : recourir toujours plus à la sous-traitance plutôt que de réaliser la recherche en interne. Enfin, la direction veut fermer le site de recherche de Strasbourg, et les salariéEs, si elles et ils ne peuvent pas rejoindre la région parisienne, seront privés d’emploi.
À ces dernières annonces s’ajoute le projet Pluton qui vise à externaliser 3 100 salariéEs répartis dans six des sites de production de principes actifs (constituant actif du médicament) en Europe à Brindisi (Italie), Francfort (Allemagne), Haverhill (Royaume-Uni), Ujpest (Hongrie), Saint-Aubin-lès-Elbeuf et Vertolaye (France), argumentant que cette nouvelle entité sécuriserait l’approvisionnement en médicaments.
Sanofi n’est plus un acteur de la recherche pharmaceutique mais un fabricant de dividendes !
La stratégie des dirigeants successifs est toujours la même : diminuer la masse salariale, fermer des sites, arrêter des activités et abandonner des axes thérapeutiques. La recherche en interne est remplacée par des partenariats ou l’achat de molécules auprès d’entreprises de biotechnologie, les activités de développement sont sous-traitées par des prestataires et les fonctions supports sont externalisées auprès de sociétés de services. Sanofi devient une coquille vide qui gère de la sous-traitance et vend des médicaments. Les dividendes généreusement distribués aux actionnaires sont censés récompenser le risque lié à l’investissement boursier mais dans les faits les actionnaires ont peur du risque et ne veulent pas assumer celui lié aux aléas de la recherche.
Quels médicaments et quelle industrie pharmaceutique pour demain ?
Pour ces financiers, la santé publique ne fait pas partie des préoccupations. Est-ce bien raisonnable de compter sur eux pour prendre soin de notre santé, décider des médicaments dont nous avons besoin ? De quel droit, sur quels critère Sanofi a-t-il décidé en 2018 d’abandonner la recherche sur les antibiotiques ? N’avons-nous plus besoin d’antibiotiques ? Évidemment non, c’est parce que ces médicaments ne sont plus assez rentables ! La question des besoins de santé ne se pose pas seulement aux salariéEs de la Big Pharma mais à chacun d’entre nous. Collectivement nous devons exiger une industrie pharmaceutique au service des patientEs et de l’intérêt général.
Des résistances fragiles
Cette stratégie financière se traduit en milliers de suppressions de postes, en abandon d’axes thérapeutiques majeurs, en externalisation et en vente de sites ou encore en politique salariale méprisante. Le recours au travail précaire explose. L’annonce de 0,6 % d’augmentation pour les salariéEs non cadres et 0 % pour les cadres passe mal quand Sanofi affirme vouloir verser quatre milliards pour les actionnaires.
C’est donc pour l’ensemble de l’œuvre de la direction que des salariéEs se mobilisent un peu partout en France. Quand le 4 février était organisé un tribunal populaire devant le siège parisien, des salariéEs du site de Sisteron ont entamé une grève reconductible, prolongée le 15 février pour une semaine. L’usine est aujourd’hui toujours partiellement à l’arrêt. De leur côté, les salariéEs des sites de R&D très impactés perturbent les instances où sont déclinées les annonces. Une nouvelle journée d’action nationale est déjà prévue le 4 mars à Paris. Il est compliqué de construire une mobilisation quand certains préfèrent quitter un emploi dégradé avec un « gros » chèque de départ quand d’autres se contentent de ne pas être impactés... pour le moment.
Nous revendiquons une industrie du médicament au service des besoins de santé
– L’arrêt des suppressions de postes et des embauches à hauteur des besoins et des ressources de Sanofi ;
– Le maintien et le développement de notre outil de travail : investissement sur les sites, maintien de tous les sites de recherche et de production de médicaments dans Sanofi ;
– La participation des associations de patientEs, des citoyenEs et des autorités de santé dans le choix des axes thérapeutiques pour les médicaments de demain ;
– La transparence sur la fixation des prix des produits de santé et sur les essais cliniques.