Sébastien Fontenelle, Seuil, 2013, 17 euros.
«Le grand dialogue » ne fut pas le grand pardon. Cette opération, menée par la direction suite à une vague de suicides, a masqué une réalité de plus en plus stressante. On sait ce que les mots cachent dans le monde de l’entreprise. Mis en alerte par un cas de suicide à La Poste, le journaliste Sébastien Fontenelle a rencontré les salariés les plus attaqués, ce fut longtemps le cas des guichetiers, et a découvert aussi la souffrance plus surprenante des managers.
Depuis que La Poste est une entreprise concurrentielle, les arrêts maladie pleuvent, les tentatives de suicide explosent, comme à Marseille où Sonia Z. se taille les veines après un retour de congé maladie. La Poste sous le règne de Jean-Paul Bailly, c’est la fin des relais de poste et la modernisation à tout crin. On minimise les effets des nouvelles formes de travail appliquées dans une entreprise publique où le sens de l’intérêt général primait, avant que les missions de banque ou de services ne domine le bureau. La segmentation de l’activité, le chronométrage, les logiciels espions qui détectent uniquement les erreurs et les temps morts rendent infernale la vie des postiers. Outre la lettre verte, écolo mais qui voyage en avion et camion, les conflits de valeurs explosent au sein de la Banque postale dont la mission était d’ouvrir un compte aux moins riches.
De l’usager au client, et des alertes aux suicides, l’auteur examine, sans l’humour ravageur qui lui est habituel, les intestins de cette grande société que les socialistes ont découpée en morceaux avec la réforme Quilès. Une société devenue anonyme, même pour ses salariéEs...
Christophe Goby