Label Pince-oreilles, 2024, 16 euros.
Nos chouchous de Watchdog sortent un nouvel album qui s’avère encore une fois bien réjouissant de créativité. Anne Quillier (claviers) et Pierre Horckmans (clarinettes) reviennent en quelque sorte « aux sources » de ce groupe, né il y a tout juste dix ans, et dont les apparitions régulières sont entrecoupées par de nombreuses échappées dans d’autres formations.
Après la formidable expérience Les animaux qui n’existent pas, où le duo conviait une comédienne et poétesse aux textes forts et imagés, nous aurions bien tort de bouder ce retour à deux et en instrumental. Voilà assurément une pierre de plus ajoutée à l’édifice du kiff des oreilles qu’il et elle bâtissent avec sérénité et régularité.
Le piano électrique et les clarinettes sont toujours truffés de traitements qui modifient leur timbre de manière étonnante. L’expérimentation sonore, peut-être moins systématique que sur les trois précédents enregistrements mais poussée encore plus loin à mesure qu’on avance dans l’écoute, est réussie en ce sens qu’elle ne fait pas diversion ni ne gêne la musicalité. Aucun effet n’est gratuit ou superflu et, au-delà du « comment font-iels cela ? », on se dit que tout est en bonne place. Parfois, on est porté aux confins du space rock et au bon moment on revient au minimalisme d’une intimité chaleureuse.
Une pochette du dessinateur Benjamin Flao comme un décor de théâtre qui semble renfermer mille recoins à explorer, des titres toujours aussi mystérieux (qui rêve dans « Le rêve de l’autre » ?), ajoutons à cela un clip que l’on trouvera, au choix, drôle, flippant ou les deux (où nos protagonistes sont affubléEs de masques de caniche et de lapin façon Donnie Darko) et on se dit que, décidément, tout dans cet univers invite à se laisser emmener dans des méandres de fantasmagories et à se faire sa propre histoire.
Les mélodies, toujours aussi tordues, inattendues, ludiques et inexplicablement émouvantes, participent à une musique généreuse et accueillante. Exigeante bien sûr, juste ce qu’il faut pour marquer sa singularité, mais sans oublier d’être accessible. Bref, n’ayez pas peur du chien de garde, ses jappements sont toujours amicaux pour les oreilles qui se montrent curieuses.
Benjamin Croizy