CD Album, Cinq 7, 2025, 13 titres, 16,99 euros.
Solann Lis-Amboyan a des choses à dire. Elle parle de ses « petites névroses ». Pour certaines, elle les susurre en musique, quand elle en assène d’autres avec force. Solann n’a pas peur de jeter à la face du monde ses fragilités, Solann ne craint pas de clamer qu’elle ne se laissera pas faire. Elle est jeune, fragile, femme, forte et en(r/g)agée.
Solann a remporté une Victoire de la musique (a-t-on déjà célébré un tel trophée dans ces colonnes ?), mais il semble que pour elle la véritable victoire soit la musique elle-même, que la création (elle écrit et joue du théâtre, aussi) lui donne la force d’affronter la vie.
Pour les femmes
Écouter Solann, c’est vrai que ça fait du bien, que c’est agréable, que cela peut accompagner les gestes de la vie... Mais écoutez, vraiment, Solann, pour en ressentir, d’abord la force, la puissance, puis pour en dégager la pertinence sensible. Solann chante pour Solann, mais Solann chante pour les filles, Solann chante pour les femmes, pour dire leur douleur et aussi leur colère, leur détermination, leur rage même ! Solann chante contre le patriarcat, et affronte bravement les quolibets, les insultes, que certains déversent sur les rézosocios à son encontre
La rage douce…
Le morceau qui tourne en boucle sur les radios, « Rome », est maintenant connu et largement commenté. La plume peut donc s’attarder sur ses autres titres, à l’éclectisme assumé — je vous présente ma chambre, plaisante-t-elle — comme l’énigmatique et symphonique « Mayrig » ou « Insomnie », sur lequel Solann s’accompagne au ukulélé, l’instrument préféré des enfants de divorcés, dit-elle. Ou encore « Noctambule » qui clame que « de nuit les gens sont beaux ». Plus tonique, « Comme les animaux », plus suave, à l’ironie mordante dans « Appelle-moi sorcière ». « Les draps » contiennent bien Solann, qui disent par des mots bien choisis, tout en douceur, le drame, la tragédie.
Mention spéciale pour le très brûlant « Tout cramer », qui pourrait servir d’hymne, dans la situation politique actuelle, désespérée mais forte de potentialités émeutières : « faudrait tout cramer, j’vois qu’ça ! »
Claude Moro