Éditions L’Iconoclaste, 2023, 271 pages, 32 euros.
À la suite du décès de Mahsa Jina Amini, le 16 septembre 2022, battue à mort par la police des mœurs pour un voile mal porté, une véritable révolution féministe — pour la première fois soutenue par les hommes — éclate en Iran. Un an plus tard, Marjane Satrapi, autrice et réalisatrice franco-iranienne, réunit trois spécialistes et 17 talents de la BD pour rendre hommage à ces IranienEs, souvent très jeunes, qui luttent malgré la répression sanglante à laquelle iels sont confrontéEs.
« Avoir 20 ans en Iran et mourir pour le droit des femmes »
Ce livre se divise en trois parties. D’abord, les événements : manifestations, tortures, exécutions, les faits, dans toute leur brutalité. Ensuite, de l’histoire. Pour comprendre ce soulèvement, il faut comprendre l’Iran, théâtre de plusieurs révolutions, sa population, sa culture, ses contradictions. Comprendre la corruption, l’instrumentalisation de la religion. Comprendre que ce mouvement est celui des femmes, mais pas seulement. Enfin, la résistance face au régime inflexible, la rencontre de celleux qui luttent pour la liberté, dans les rues ou par une résistance silencieuse, mais déterminée, parfois au prix de leur vie.
Si l’injustice et la violence bouleversent, ce sont la force et le courage de ces jeunes qui nous secouent, surtout. Au fil des pages, on pleure les victimes et on tremble pour ces femmes et ces hommes qui vivent sans compromis malgré les risques. Pour un voile, pour un match, pour avoir refusé les règles, on est fouetté, emprisonné, tué. Ces histoires vraies révoltent mais, plus encore, elles inspirent.
« Ils ont déjà perdu, mais leur violence perdure »
La répression du soulèvement a fait 551 morts, dont 68 enfants et 49 femmes. 22 000 personnes — dont de nombreux journalistes ou avocatEs — ont été arrêtées, souvent torturées, parfois exécutées. Un an après le début du soulèvement, alors que le régime, de moins en moins soutenu, réprime plus que jamais la contestation, un projet de loi est étudié pour durcir encore les sanctions pour violation du « soutien à la culture du hijab et de la chasteté ». Mais le peuple, « malgré le sang, n’a plus peur ».
Femme Vie Liberté est un roman graphique puissant, dur et beau, où les styles graphiques et les plumes se mêlent et se répondent, alternant fiction et faits réels pour nous éclairer sur les enjeux du soulèvement. À lire avec Barayé1, magnifique hymne de ce mouvement écrit par Shervin Hijapour, en fond sonore.