Ouvrage collectif de Sébastien Fontenelle, Mona Chollet, Olivier Cyran et Laurence De Cock.
En 2009 paraissait les Éditocrates, ou comment parler de (presque) tout en racontant (vraiment) n’importe quoi, galerie de portraits de ces experts en rien qui ont un avis sur tout, qui peuplent les plateaux télé, les ondes radios et les colonnes des journaux : Bernard-Henri Lévy, Jacques Attali, Alain Duhamel, Philippe Val, Laurent Joffrin et quelques autres étaient ainsi passés au crible d’une critique au vitriol, souvent drôle, dénonçant leur vanité, leur boursouflure, et le vide de leur « pensée ».
Une corporation qui se radicalise
Près de 10 ans plus tard, même si la corporation ne se renouvelle que très lentement, un nouvel opus s’imposait. Comme le rappelle en effet Sébastien Fontenelle dans l’introduction de l’ouvrage, « aujourd’hui comme hier, les éditocrates ont des avis sur tout, et l’obsession de les faire partager au plus grand nombre. Aujourd’hui comme hier, ils fabriquent du consentement : par l’incessante répétition des mêmes vraies-fausses évidences, ils contraignent leurs publics – ou peut-être sont-ce des clientèles – dans l’acquiescement aux "réformes" antisociales dont ils assurent, très fidèlement, le service après-vente. »
Ce sont de nouveau les portraits de 10 éditocrates qui nous proposés : Brice Couturier, Jacques Julliard, Franz-Olivier Giesbert, Jean Quatremer, Arnaud Leparmentier, Plantu, Éric Zemmour, Natacha Polony, Valérie Toranian et Élisabeth Levy. C’est bien écrit, c’est toujours aussi drôle, ça éparpille façon puzzle, et ça fait du bien.
Mais c’est aussi, il faut le dire, un peu angoissant : on se rend en effet compte qu’en 10 ans, une radicalisation s’est opérée dans la corporation, notamment vis-à-vis de l’islam et des musulmanEs : « il n’est plus seulement question, lorsque les "arbitres du débat public" ajoutent l’anathémisation d’une minorité à leurs fustigations – toujours plus véhémentes – des luttes sociales, de contenir l’opinion dans son consentement à un ordre injuste ; il s’agit, bien plus dangereusement, de la gagner au pire. »
Julien Salingue