Publié le Mercredi 2 février 2022 à 14h34.

Louise, d’Émile Parisien

Un CD chez ACT Music, 17,99 euros.

Émile Parisien est de retour, en cette fin janvier 2022, avec un sextet de choc et un nouvel album rempli à la fois d’énergie et de douceur : Louise.

Plus de 20 albums

Le presque quadragénaire, natif de Cahors, est entré au collège de Jazz de Marciac à l’âge de 11 ans avec pour ange tutélaire le grand Wynton Marsalis, puis il s’est perfectionné au Conservatoire de Toulouse où il est passé du sax alto au sax soprano pour « trouver un son entre violoncelle et hautbois ».

Musicien recherché par ses pairs, il a déjà enregistré plus de 20 albums dont 8 sous son patronyme. Ses créations récentes sont d’une qualité époustouflante, qu’il s’agisse d’un jazz contemporain comme Sfumato avec le piano de Joachim Kühn et la clarinette de Michel Portal1, ou de la re-visitation du tango argentin moderne avec Vincent Peirani pour Abrazo2.

« Louise », un lumineux retour aux sources

Ce retour aux sources du jazz moderne, il le fait avec la mise sur pied d’un sextet franco-américain de haute volée. Émile Parisien a choisi Théo Croker pour tenir la trompette tandis que la rythmique est assurée par le batteur Nasheet Waits et le bassiste Joe Martin. Les complices musicaux habituels, le pianiste Roberto Negro et le guitariste Manu Codja, sont de ce voyage américain dans l’univers de l’artiste Louise Bourgeois et ses araignées légendaires symbolisant la maternité. Celui que Francis Marmande a décrit dans le Monde comme « la meilleure nouvelle du jazz européen depuis longtemps » développe au maximum son concept de partage. La musique, « c’est un partage, une conversation permanente, une dynamique qui nous permet de recevoir et de créer ensemble ». Concept appliqué à la lettre puisque sur les neuf morceaux de l’album, Émile Parisien n’en signe que cinq dont « Louise », le titre éponyme et un fabuleux « Memento » en trois parties. Roberto Negro, Manu Codja et Théo Crocker livrent leurs propres compositions tandis que le sextet donne ensemble une adaptation très réussie du « Madagascar » de Joe Zawinul.

Narration musicale et répétition

Émile Parisien et son sextet nous offrent une musique d’une grande générosité, à la fois poétique et fougueuse, où il sait se mettre en retrait quand il faut savoir mettre en scène musicalement les sculptures existentialistes de sa muse temporelle ancrée comme lui dans une histoire personnelle pleine de rebondissements. Une grande énergie et la douceur de la passion cohabitent dans ce nouvel opus enregistré à la maison de la culture d’Amiens.

Formé par les meilleurs, Émile Parisien a toujours été sensible à la narration dans sa musique et tout ce qu’il écrit se retrouve dans un système de narration ou la répétition d’un thème permet évolution et improvisation. « Au départ, le morceau Louise était écrit comme l’ouverture d’un poème symphonique, c’est pour cela qu’il commence tout doucement. Puis, le thème évolue, et il finit par s’assoir et laisser une place à d’autres plages, d’autres morceaux » qui donne ici le meilleur album jazz de cette rentrée 2022. Quelques privilégiés auront pu s’en rendre compte en « live » à Sons d’hiver au Kremlin-Bicêtre. L’album est disponible et quelques tracks sont en audition libre sur FIP ou sur les sites de streaming. On en profitera sans compter.

  • 1. Sfumato, un CD ACT Music. Voir l’Anticapitaliste n° 464 du 21 février 2019.
  • 2. Abrazo, un CD ACT Music. Voir l’Anticapitaliste n° 540 du 22 octobre 2021.