Publié le Lundi 13 novembre 2023 à 15h00.

Nous, étudiants !, de Rafiki Fariala

Congo Kinshasa (RDC), République centrafricaine, France, 2022, durée 1 h 22 minutes, sortie le 15 novembre.

Voilà un objet cinématographique singulier ! Premier long métrage de Rafiki Fariala qui, tel un homme-orchestre, outre la réalisation, assume l’écriture du récit, la musique et donne de sa personne des deux côtés de la caméra.

En micro-sociologue...

Rafiki Fariala cherche à rendre compte d’une situation dont il est partie prenante. Il filme ses amiEs, qu’il n’hésite pas à interpeler directement pendant des entretiens, au fil de la vie, de la même façon que, en retour, il se fait apostropher par l’un d’entre eux : « je ne suis pour toi qu’un personnage ! » Cette approche confère une rare authenticité à son film, qui oscille entre les catégories souvenir de famille et œuvre expérimentale. C’est sans doute ce regard « de l’intérieur » qui permet des dévoilements très profonds de protagonistes très pudiques. La vie à la cité U, les relations entre camarades, la survie, les relations avec les filles, les destins croisés, les vies entravées...

En politique

Rafiki Fariala ne propose pas un film politique, mais pour la dénonciation de la situation des étudiants en RCA : il n’y a qu’à regarder, il suffit d’écouter ! Les amphis bondés, des examens bradés, des étudiantEs malmenéEs, leurs études soumises à la corruption, au clientélisme, voire pire, le droit de cuissage exercé par certains professeurs sur les jeunes étudiantes ! D’où le mantra : « dégagez, laissez-nous la place ! » D’où une forme de désespoir, très fort dans certains témoignages, surtout du côté des jeunes filles, le plus souvent surmonté par un profond optimisme : ils et elles sont la nouvelle génération sur laquelle l’avenir de la République centrafricaine devra reposer !

En artiste

La musique ! Rafiki Fariala, musicien, chante la situation ! En griot, tel un récitant, il intervient tout au long de son récit pour donner le fil rouge ! Il nous livre ainsi les clés du film, évite une voix off qui serait intrusive, lui préfère là encore une petite musique partagée, portée par les personnages du film, en écho à ses harmonies.

Sans esthétisme, ses images simples de la vie des étudiants de Bangui, y compris au travers de leurs incursions au village, dans leurs relations sociales et familiales, offrent une photographie foisonnante d’une Afrique réelle, austère, dure et belle...