Publié le Mercredi 3 novembre 2021 à 14h26.

Une histoire populaire de la France, volume 1 (de l’État royal à la Commune)

Lisa Lugrin et Clément Xavier (scénaristes) ; Alain Gaston Rémy (illustrateur) ; Marie Favantines (coloriste). Éditions Delcourt, 256 pages, 21,90 euros.

Gérard Noiriel, dans son Histoire populaire de la France, a voulu rompre avec une vision de l’histoire qui s’organise autour de quelques grands hommes (rarement des femmes). Le pari de cette adaptation en BD était de faire émerger des planches les sans-grades, les invisibles, dont on ne parle pas, ou si peu, de leur donner une image et une place.

Comme dans tous les tours de magie, il y a un truc !

La BD met en réalité en scène Noiriel lui-même, supposé s’adresser au public via une conférence gesticulée. L’artifice fonctionne parfaitement, rendant naturels les décrochages dans la chronologie, amenant des transitions utiles et permettant même une distorsion de l’espace et du temps qui fait surgir les spectateurEs sur les barricades, pavé en main, aux côtés de Louise Michel !

Surgissement des masses, émergence de la conscience

Au début fut le roman national, et l’on voit un Sarkozy paver la voie aux extrêmes droites de tout poil. Il en fallut du courage pour en écorner les pages ! La lutte des esclaves pour leur liberté, les jacqueries, les sans-culottes et la prise de la Bastille, ce sont les masses, ce sont les basses classes, à l’engagement sans réserve, prêtes à en découdre. Presque toujours perdantes, bien souvent manipulées, trahies par des dirigeants qui n’en sont pas et finalement prennent peur. Et peu à peu, surgissent des collectifs, des idées, des femmes et des hommes, des regroupements, qui comprennent que l’action des masses doit servir leurs intérêts propres, leurs intérêts de classe ! Ce n’est pas pour rien que le volume 1 se termine sur la Commune de Paris !

Efficace, la BD !

Transposer en BD, c’est toucher un public différent. Mais, malgré un volume imposant, pas facile de tout y mettre en restant intelligible ! Cela exige des textes un peu longs, qui heureusement s’appuient sur des dessins assez précis pour que l’on s’y retrouve et sur un superbe travail de la coloriste qui nous donne des indices visuels très puissants pour identifier les anonymes et accompagner leur émergence dans l’Histoire, avec un grand H !