La guerre civile espagnole comportait un problème colonial qui pouvait être décisif pour la révolution, celui de la zone marocaine du Rif...
Un soulèvement riffain présentait un intérêt militaire et immédiat : il aurait pris Franco dans un étau et aurait créé une situation très difficile dans les troupes marocaines de Franco, lui enlevant sa base d’opération, et aurait favorisé une victoire des forces républicaines. Une négociation eut lieu entre le mouvement national marocain et les autorités espagnoles, qui n’aboutit pas à cause de l’attitude de ces dernières.
David Rousset, membre de la IVe Internationale présent en août 1936 au Maroc, en rapport avec le Comité d’action marocaine qui représentait le mouvement nationaliste marocain a témoigné de cette démarche1. Les Marocains étaient prêts à engager un soulèvement militaire dans le Rif espagnol, mais à une condition expresse : que soit reconnue leur indépendance.
L’indépendance en question
Deux leaders marocains commencent une négociation avec la direction du Comité central des milices de Catalogne dominée par la CNT et la FAI. Un projet de traité reconnaissant l’indépendance avec des liens très étroits avec l’ancienne métropole est élaboré. Il est approuvé par tous les partis catalans et par le gouvernement de la Generalitat. Une cérémonie officielle est organisée, les contacts sont pris avec les tribus marocaines du Rif, la question de l’argent et des armes est réglée : les opérations militaires auraient pu assez rapidement commencer. Mais il fallait l’accord du gouvernement de Madrid...
Informés de ce projet, Paris et Londres y sont absolument hostiles. Le gouvernement espagnol s’aligne, explique à la délégation marocaine qu’il ne peut pas contre-signer le traité de Barcelone, mais qu’il était prêt à donner de l’argent et des armes pour que les opérations se fassent. Les délégués marocains voulaient la garantie de l’indépendance. C’est la rupture : l’offensive n’eut donc jamais lieu au Maroc...
Patrick Le Moal
Voir aussi l’article publié sur alencontre.org
- 1. Cahier d’études et de recherches IRRE n°13 (1990) « La guerre civile au Pays basque et en Catalogne » Miguel Romero, page 41.