Publié le Vendredi 5 août 2011 à 22h25.

Honduras : après le retour de Manuel Zelaya

 

Il est de retour... Ce 28 mai 2011, les rues de Tegucigalpa, capitale du Honduras, sont chamarrées des couleurs rouges du Front national de la résistance populaire (FNRP)1 pour accueillir « EL , le président déchu Manuel Zelaya, après dix-huit mois d’exil forcé à la suite du coup d’État du 28 juin 2009. Un coup d’État rendu possible par l’attitude bienveillante de l’administration Obama et de nombreux officiers US en poste dans les bases militaires de ce pays d’Amérique centrale.

Le retour de Zelaya, ex-dirigeant du Parti libéral qui avait initié un cycle de réformes sociales et démocratiques, tout en rompant avec l’oligarchie locale (particulièrement en intégrant l’Alba2), est avant tout le résultat de mois de fortes mobilisations collectives. Il est aussi le fruit de négociations diplomatiques difficiles. Pour Thierry Deronne (journaliste à Caracas), « e retour n’est dû qu’à la force croissante des Latino-Américains, aux syndicats, aux mouvements paysans, indigènes et aux organisations populaires progressistes du Honduras, au travail constant des médiateurs du Venezuela, de la Colombie, du Brésil, du Nicaragua... 3. En effet, la fin de l’exil de MEL a été facilitée par les discussions menées par le président Hugo Chávez dans le cadre d’un rapprochement, à haut risque, avec son homologue colombien Juan Manuel Santos, figure de la droite dure latino-américaine. Cette médiation n’est bien entendu pas sans contrepartie  « ’accord de Carthagène  a permis la réintégration, le 1er juin dernier, du Honduras au sein de l’Organisation des États américains (OEA), et donc la reconnaissance internationale de Porfirio Lobo… président installé après le coup d’État.

Des dizaines de milliers de personnes étaient présentes pour accueillir Zelaya, partageant un grand moment de liesse populaire. Cependant, de nombreux mouvements sociaux proclament leur volonté de poursuivre un mouvement de résistance exemplaire et rejettent toute idée d’une légitimation du gouvernement en place. Les divergences publiques autour de la récente réintégration du pays dans l’OEA confirment les tensions entre la base et le sommet du FNRP, tout comme les divergences politiques qui traversent la résistance. Depuis l’assemblée générale de février, qui a réuni 1 00 délégués de tout le pays, les très diverses organisations sociales et politiques qui forment le Front s’accordaient sur un socle de revendications communes  le retour de tous les exilés, dont l’ancien président  l’autoconvocation à une Assemblée nationale constituante« articipative   la condamnation de tous les putschisteset la fin de l’impunité  enfin, la reconnaissance légale du FNRP, tout en écartant sa participation électorale. Or, ainsi que le remarque Maurice Lemoine, « lors que, depuis le coup d’État, ce sont les bases du Front qui, refusant de reconnaître la légitimité des gouvernements de MM.Roberto Micheletti (le putschiste) et Lobo (issu d’élections ‘‘illégitimes’’), ont affronté et subi la répression, le sentiment a prévalu que le mouvement, en tant que tel, n’avait pu qu’entériner une négociation menée en dehors de lui, par MM.Santos, Chávez, Lobo et Zelaya – n accord de ‘‘chefs’’ laissant le peuple de côté. 4

De fait, certains secteurs révolutionnaires du Front (tel que Espacio refundacional) considèrent l’accord de Carthagène comme la conséquence directe de la pression impérialiste et d’un recul de la direction de la résistance, dont une partie chercherait une réintégration au sein du jeu institutionnel, avec pour ligne de mire les élections présidentielles de 2013. Ceci au détriment des luttes populaires et du projet d’autoconvocation à une assemblée constituante, qui devait être organisée prochainement « ar en bas , en dehors des conditions léonines imposées par les putschistes et leur tribunal électoral. Ces thèmes ont été largement débattus le 26 juin, lors de l’assemblée extraordinaire du FNRP, ce dernier restant un outil de mobilisations unitaires indispensable. À cette occasion, Zelaya est intervenu en faveur de la création d’un nouveau parti politique, le « ront ample , défendant une participation électorale autour d’un programme qu’il nomme « ibéralisme prosocialiste 5. Face à une tentation de canalisation des luttes, les prochains mois nous diront si le mouvement social et les militants anticapitalistes sont encore en capacité de porter ce pour quoi ils se battent depuis plusieurs mois, au prix d’une répression d’État et paramilitaire toujours intense. Une situation qu’il est indispensable de continuer à dénoncer sur le plan international, alors que plus que jamais le peuple hondurien a besoin de notre solidarité.

Franck Gaudichaud

Pour suivre le groupe de travail « mériques latines  du NPA, consulter  http://ameriquelatineenl…

1. www.resistenciahonduras….

2. Alba  Alliance bolivarienne pour les peuples de notre Amérique.

3. « ui nous avons pu !! , 28 mai 2011, www.larevolucionvive.org….

4. « ’extrême droite hondurienne repasse à l’offensive , 22 juin 2011, www.zintv.org/spip.php?a….

5. Cette proposition a été approuvée à l’unanimité des délégués du FNRP.