Aujourd’hui, face au référendum, tous les députés travaillistes – sauf sept – sont en faveur du « in ». La situation n’a pas toujours été celle-ci.
À la sortie de la Seconde Guerre mondiale, la direction du Parti travailliste, comme celle des Conservateurs, était très hostile à l’idée d’un rapprochement avec l’Europe, cela avec la même argumentation nationaliste, voire impérialiste, insistant sur le fait qu’ils devaient garder leur propre arme nucléaire afin de continuer à tenir leur rang parmi les trois superpuissances. Seule la gauche du parti, dont les anciens de l’ILP, étaient pour une Europe unie.
Premier référendum...
Trente ans plus tard, la situation avait déjà beaucoup évolué. En 1973, les conservateurs avaient négocié l’entrée à la CEE. En 1974, les travaillistes ont emporté les élections après quatre années de luttes sociales massives et deux grèves des mineurs victorieuses. En 1975, la direction du parti a organisé un référendum afin de réaffirmer l’adhésion. Contrairement à aujourd’hui, le Parti conservateur était très uni et les travaillistes très divisés sur l’Europe. Ceux-ci avaient donc besoin de trancher la question... en s’appuyant sur la droite.
Le résultat fut une large victoire pour le « oui » (67 % contre 33 %), mais toute la gauche travailliste, très importante à l’époque, la quasi-totalité des syndicats et toute la gauche radicale et révolutionnaire avaient voté « non ». À part la campagne internationaliste des révolutionnaires, l’ensemble de la campagne pour le « non » était plus que teintée de nationalisme. Un nationalisme de gauche, c’est-à-dire le souverainisme des réformistes pour qui le changement ne peut être introduit que par en haut et par un État souverain et indépendant.
Pendant les années Thatcher
Depuis 1975, les positions ont de nouveau beaucoup évolué. Les années Thatcher ont pesé lourdement sur le mouvement ouvrier. Cette période de défaites, de lois antisyndicales et de démoralisation, expliquent sans doute pourquoi le mouvement syndical s’est tourné de manière assez désespérée vers l’Europe et la promesse de mesures sociales et de nouveaux droits qui pourraient s’imposer aux Conservateurs, se sentant incapables de les imposer lui-même.
Le Parti travailliste, après 18 ans dans l’opposition, s’était converti au social-libéralisme et en 2015, la gauche du parti, dont Jeremy Corbyn, était réduite à une poignée. Opposant depuis longtemps à l’Union européenne, il avait affirmé pendant sa campagne pour devenir dirigeant du parti que Cameron ne pouvait pas s’attendre à un soutien automatique du Parti travailliste au vote « in ». Peu après son élection, il change sa position, et se déclare aujourd’hui en faveur du maintien dans l’UE, pour un « in » critique et pour une autre Europe.
Quant aux syndicats, la confédération nationale, le TUC, est pour le « in », ainsi que la grande majorité des syndicats.
Le Parti national écossais (SNP) est unanimement pour rester, même s’il souhaite sans doute en privé que le Brexit l’emporte... car cela leur donnerait un prétexte pour exiger un nouveau référendum sur l’indépendance.
Une gauche radicale et révolutionnaire divisée
Une partie de la gauche est pour le Brexit et s’est regroupée dans une campagne qui s’appelle Lexit –Left Leave. Elle est composée du Socialist Workers Party, du Parti communiste (GB), et du syndicat RMT (Rail, Maritime and Transport Union), The Indian Workers Association et Counterfire qui comprend plusieurs animateurs de la Coalition Stop the War. Parmi les intervenantEs dans les meetings, on trouve des personnes comme Tariq Ali ou Alex Gordon, ancien président du RMT. Enfin, une autre organisation, le Socialist Party (CIO) fait aussi campagne sur des bases similaires pour le Brexit.
Quant au choix de rester dans l’UE, la plupart des forces de la gauche radicale se trouvent dans la campagne « Another Europe is possible ». Parmi les animateurs de cette campagne, on trouve Left Unity (le regroupement initié par Ken Loach), le Green Party, et la gauche du Parti travailliste, dont le groupe Momentum fondé par des soutiens de Jeremy Corbyn. Parmi les porte-parole de cette campagne, on trouve Yanis Varoufakis, John McDonnell, le bras droit de Corbyn, et Caroline Lucas, députée des Verts. C’est à ce regroupement que Socialist Resistance apporte un soutien critique.